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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/177

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et les paisibles dortoirs des religieuses furent forcés de s’ouvrir pour recevoir les officiers anglais blessés.

On y porta, entre autres, le major Fitzgerald, jeune homme doux, aimable, et de la plus belle figure ; le hasard fit qu’il fut confié aux soins de Julia ; sa guérison fut longue et longtemps douteuse ; enfin il fut déclaré hors de danger, et il le devait plus aux soins attentifs de sa jeune garde qu’à tous les secours de la médecine.

Le major était sensible, Julia aussi malheureuse que belle. L’amour s’alluma bientôt dans leurs cœurs.

Une brigade anglaise était campée dans le voisinage du couvent, le jeune couple alla y chercher une protection contre la vengeance paternelle ; ils furent mariés par l’aumônier du régiment, et jouirent pendant un mois d’un bonheur sans mélange.

Comme Buonaparte était attendu de jour en jour sur le théâtre de la guerre, ses généraux veillaient avec soin à leurs propres intérêts, sinon à ceux de leur maître. Le corps de troupes dans lequel Fitzgerald avait cherché un refuge fut surpris et repoussé avec perte.

Après avoir fait son devoir comme soldat, et combattu vaillamment au poste de l’honneur, le major entreprit de protéger la fuite de Julia ; mais déjà toute retraite leur était coupée, et ils tombèrent tous deux entre les mains de l’ennemi. Ils furent traités avec douceur : on leur laissait même autant de liberté que le permettait la prudence, lorsqu’ils furent compris dans l’ordre de départ, qui voulait que tous les prisonniers fussent conduits en France. Déjà ils approchaient des Pyrénées, lorsqu’un parti anglais attaqua leur escorte et la mit en déroute ; tous les prisonniers prirent la fuite, à l’exception du major et de sa jeune épouse.

Tandis que les Français faisaient des prodiges de valeur pour résister au nombre, une balle frappa le malheureux Fitzgerald ; il ne survécut qu’une heure à sa blessure, et mourut où il était tombé, sur le champ de bataille.

Un officier anglais, avant de se mettre à la poursuite des fuyards, fut attiré par la vue d’une femme cherchant à ranimer les restes de la vie d’un blessé, et paraissant dans l’agonie de la douleur. Il revint sur ses pas, et arriva quelques instants avant le dernier soupir de Fitzgerald, à qui il ne restait plus que la force nécessaire pour implorer de son compagnon la promesse de pro-