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Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t1, 1892.djvu/41

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les détails de son aventure, tous à la fois et très précis. Il frémissait à la pensée que les cheveux d’Eugénie avaient presque effleuré son visage, quand elle était tombée dans ses bras ; il sentait encore sur sa main l’étreinte de la main de la jeune femme ; il se souvenait qu’elle avait des gants de peau de Suède. Il se disait qu’il la reverrait ; il prononçait tout haut des paroles vagues. Il se répétait vingt fois l’adresse de M"*’ Henry, 17, faubourg Saint-Jacques, comme s’il eût craint de l’oublier. Il se trouvait plus fort, plus souple et plus léger que d’habitude ; il lui semblait que son sang circulait plus vite.

En traversant le pont Saint-Michel, il vit passer, au milieu de la chaussée, une bande d’étudiants parmi lesquels il reconnut, de loin, son ami Gazaban. Tous beuglaient la Marseillaise.

« Ah ! c’est vrai, la guerre ! pensa-t-il, je l’avais oubliée.»