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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/138

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Jodelet, dont le véritable nom était Julien Geoffrin, entra au Marais en 1610, passa au mois de décembre 1634 à l’hôtel de

    Et que si nous étions artisans de nous-mêmes,
    On ne verroit partout que des beautés extrêmes,
    Qu’un chacun se feroit le nez efféminé,
    Et que vous l’avez tel que Dieu vous l’a donné.

    Dans Jodelet duelliste**, Béatris lui dit en manière de compliment :

    Ô mon cher Jodelet, au visage de dogue.

    Gusman, parlant de D. Bertrand de Cigarral, son maître, rôle que remplissait Jodelet dans la pièce de Thomas Corneille qui porte ce titre***, fait la réflexion suivante :

    … Quant à la parole, il a grand agrément,
    Et débite son fait fort nazillardement.

    Enfin, dans l’Amour à la mode****, du même auteur, où nous voyons Jodelet reparaître sous le nom de Cliton, Lisette lui met ainsi sous les yeux les défauts de sa personne :

    Tu m’abandonnerois, toi que met hors de mise
    Ton poil déjà grison et ta nazillardise !

    De si belles qualités ne pouvaient manquer de figurer dans son épitaphe ; aussi Loret n’eut-il garde de les oublier, et mit-il dans sa Gazette du 3 avril 1660, quelques jours après la mort du célèbre comédien :

    Ici gît qui de Jodelet
    Joua cinquante ans le rôlet,
    Et qui fut de même farine
    Que Gros-Guillaume et Jean Farine,
    Hormis qu’il parloit mieux du nez
    Que lesdits deux enfarinés.
    ............

    On voit que, dans l’emploi que tenait Jodelet, son vice de prononciation était considéré comme un agrément. Tel est aussi l’avis d’un autre contemporain, qui se flatte de nous faire connaître la cause de ce défaut : « Jodelet parle du nez pour avoir été mal pansé… (Tallemant nous dit de quel mal), et cela lui donne de la grâce*****. »

    *. Comédie en cinq actes, par Scarron, représentée en 1645. Acte I, scène i.

    **. Comédie en cinq actes, par Scarron, représentée d’abord, en 1646, sous le titre des Trois Dorothées. Acte II,  ii.

    ***. Comédie en cinq actes, représentée en 1650. Acte I, scène ii.

    ****. Comédie en cinq actes, représentée en 1651. Acte IV, scène vii. — Nous connaissons encore trois pièces, outre celles dont nous venons de parler, où Jodelet figure sous son nom : Jodelet astrologue, comédie en cinq actes et en vers, par Douville, représentée en 1646 ; le Déniaisé, comédie en cinq actes et en vers, de Gillet et de Tessonnerie, représentée en 1647 ; enfin le Geôlier de soi-même, comédie en cinq actes et en vers, de Thomas Corneille, jouée en 1655. « Cette pièce, qui a toujours conservé ce titre dans les œuvres de son auteur, se représente cependant depuis très-longtemps, disent les frères Parfait (tome V, p. 120, note a), sous celui de Jodelet prince. »

    *****. Historiettes, tome VII, p. 177.