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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/238

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1515Et dans la lâcheté du vice où je te voi,
Tu n’es plus gentilhomme, étant sorti de moi[1].

DORANTE.

Moi ?

GÉRONTE.

Moi ?Laisse-moi parler, toi de qui l’imposture
Souille honteusement ce don de la nature :
Qui se dit gentilhomme, et ment comme tu fais,
1520Il ment quand il le dit, et ne le fut jamais.
Est-il vice plus bas, est-il tache plus noire[2],
Plus indigne d’un homme élevé pour la gloire ?
Est-il quelque foiblesse, est-il quelque action
Dont un cœur vraiment noble ait plus d’aversion,
1525Puisqu’un seul démenti lui porte une infamie
Qu’il ne peut effacer s’il n’expose sa vie,
Et si dedans le sang il ne lave l’affront
Qu’un si honteux outrage imprime sur son front ?

DORANTE.

Qui vous dit que je mens ?

GÉRONTE.

Qui vous dit que je mens ?Qui me le dit, infâme ?
1530Dis-moi, si tu le peux, dis le nom de ta femme.
Le conte qu’hier au soir tu m’en fis publier…

CLITON, à Dorante.

Dites que le sommeil vous l’a fait oublier.

GÉRONTE.

Ajoute, ajoute encore avec effronterie
Le nom de ton beau-père et de sa seigneurie ;
1535Invente à m’éblouir quelques nouveaux détours.

CLITON, à Dorante.

Appelez la mémoire ou l’esprit au secours.

  1. Var. Tu n’es pas gentilhomme, étant sorti de moi. (1644 in-4o)
  2. Var. Est-il vice plus lâche, est-il tache plus noire. (1644-56)