Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

DORANTE.

Sans lire ?

SABINE.

Sans lire ?Sans rien lire.

DORANTE.

Sans lire ?Sans rien lire.Et tu l’as enduré ?

SABINE.

1645Ah, si vous aviez vu comme elle m’a grondée !
Elle me va chasser, l’affaire en est vidée.

DORANTE.

Elle s’apaisera ; mais, pour t’en consoler,
Tends la main.

SABINE.

Tends la main.Eh ! Monsieur.

DORANTE.

Tends la main.Eh ! Monsieur.Ose encor lui parler.
Je ne perds pas sitôt toutes mes espérances.

CLITON.

1650Voyez la bonne pièce avec ses révérences !
Comme ses déplaisirs sont déjà consolés,
Elle vous en dira plus que vous n’en voulez.

DORANTE.

Elle a donc déchiré mon billet sans le lire[1] ?

SABINE.

Elle m’avoit donné charge de vous le dire ;
Mais, à parler sans fard…

CLITON.

1655Mais, à parler sans fard…Sait-elle son métier ?

SABINE.

Elle n’en a rien fait et l’a lu tout entier.
Je ne puis si longtemps abuser un brave homme.

  1. Il y a dans les Plaideurs de Racine (acte II, scène vi) un vers presque semblable :
    Avez-vous déchiré ce papier sans le lire ?