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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/250

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Tu me vas voir, Cliton, jouer un nouveau jeu.
Sans changer de discours changeons de batterie.

LUCRÈCE, à Clarice.

1730Voyons le dernier point de son effronterie.
Quand tu lui diras tout, il sera bien surpris.

CLARICE, à Dorante.

Comme elle est mon amie, elle m’a tout appris :
Cette nuit vous l’aimiez, et m’avez méprisée.
Laquelle de nous deux avez-vous abusée ?
1735Vous lui parliez d’amour en termes assez doux.

DORANTE.

Moi ! depuis mon retour je n’ai parlé qu’à vous.

CLARICE.

Vous n’avez point parlé cette nuit à Lucrèce ?

DORANTE.

Vous n’avez point voulu me faire un tour d’adresse ?
Et je ne vous ai point reconnue à la voix ?

CLARICE.

1740Nous diroit-il bien vrai pour la première fois[1] ?

DORANTE.

Pour me venger de vous j’eus assez de malice
Pour vous laisser jouir d’un si lourd artifice,
Et vous laissant passer pour ce que vous vouliez,
Je vous en donnai plus que vous ne m’en donniez.
1745Je vous embarrassai, n’en faites point la fine :
Choisissez un peu mieux vos dupes à la mine.
Vous pensiez me jouer ; et moi je vous jouois,
Mais par de faux mépris que je désavouois ;
Car enfin je vous aime, et je hais de ma vie
Les jours que j’ai vécus sans vous avoir servie[2].

  1. Var. Vous diroit-il bien vrai pour la première fois ? (1644 in-4o)
  2. Var. Les jours que j’ai vécus (a) sans vous avoir servie. (1644-56)

    (a) Les autres éditions portent ici, comme plus haut, vécu, sans accord. Voyez ci-dessus, p. 192, vers 950.