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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/492

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ANTIOCHUS.

Prince, il faut le venger.J’accepte cette loi.
Nommez les assassins, et j’y cours.

RODOGUNE.

1175Nommez les assassins, et j’y cours.Quel mystère
Vous fait, en l’acceptant, méconnoître une mère ?

ANTIOCHUS.

Ah ! si vous ne voulez voir finir nos destins,
Nommez d’autres vengeurs ou d’autres assassins.

RODOGUNE.

Ah ! je vois trop régner son parti dans votre âme :
Prince, vous le prenez.

ANTIOCHUS.

1180Prince, vous le prenez.Oui, je le prends, Madame,
Et j’apporte à vos pieds le plus pur de son sang,
Que la nature enferme en ce malheureux flanc.
Satisfaites vous-même à cette voix secrète
Dont la vôtre envers nous daigne être l’interprète[1] ;
1185Exécutez son ordre, et hâtez-vous sur moi
De punir une reine et de venger un roi ;
Mais quitte par ma mort d’un devoir si sévère,
Écoutez-en un autre en faveur de mon frère.
De deux princes unis à soupirer pour vous
1190Prenez l’un pour victime et l’autre pour époux ;
Punissez un des fils des crimes de la mère,
Mais payez l’autre aussi des services du père,
Et laissez un exemple à la postérité

  1. Var. [Dont la vôtre envers nous daigne être l’interprète :]
    Elle s’explique assez à ce cœur qui l’entend,
    Et vous lui rendrez plus que son ombre n’attend (a) ;
    Mais aussi, par ma mort vers elle dégagée,
    Rendez heureux mon frère après l’avoir vengée.
    [De deux princes unis à soupirer pour vous.] (1647-56)

    (a) Et vous lui rendez plus que son ombre n’attend. (1655)