Aller au contenu

Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et non moins aiguës. De là haut, ils faisaient beaucoup de mal à mes hommes, notre demeure étant tout près du temple. Mes troupes attaquèrent la pyramide deux ou trois fois et s’efforcèrent de l’escalader, mais elle était très haute. L’escalier compte plus de cent marches et la montée est des plus escarpées ; les défenseurs étaient armés de pierres et d’armes défensives et presque à l’abri de nos attaques, car nous n’avions pu gagner les plates-formes voisines ; aussi, chaque fois que mes soldats renouvelaient l’attaque, ils étaient repoussés, ce qui exalta tellement les Mexicains, qu’ils les poursuivaient bravement jusqu’aux portes de notre palais. Voyant que s’ils continuaient à rester maîtres de la pyramide, ces Indiens non seulement continueraient à nous faire beaucoup de mal, mais puiseraient une nouvelle audace dans leurs succès, je sortis moi-même de notre quartier, quoique blessé de la main gauche. Je fis attacher mon bouclier à mon bras et je m’en fus à la pyramide suivi de quelques Espagnols, pendant que j’en faisais cerner la base, ce qui était chose facile. Les hommes cependant n’étaient pas à la fête, car il leur fallut contenir et combattre les Indiens dont le nombre s’était considérablement accru ; pour moi, je commençai à gravir l’escalier de la pyramide suivi de mes quelques Espagnols. Les Indiens se défendirent avec courage, si bien que quatre de mes soldats atteints par leurs projectiles roulèrent au pied de la pyramide ; mais grâce à Dieu et avec l’aide de sa glorieuse mère, à laquelle j’avais consacré le temple en y installant son image, nous atteignîmes la plate-forme et là, nous attaquâmes nos adversaires avec tant de vigueur que nous les obligeâmes à sauter d’un étage à l’autre, couloirs étroits qui se succédaient en étage autour de la pyramide. La pyramide avait quatre de ces étages à une distance de 18 pieds l’un de l’autre. Plusieurs furent précipités du haut en bas où ils arrivaient brisés et où mes soldats les achevaient. Quant à ceux qui restèrent sur la terrasse d’en haut, ils luttèrent avec une telle opiniâtreté qu’il nous fallut plus de trois heures pour les exterminer ; de sorte que tous moururent sans que pas un seul nous échappât. Je puis assurer à Votre Majesté que ce fut là une étonnante victoire, et que si Dieu n’avait pas brisé leur effort