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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/128

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même nuit que je fis réparer les tours qu’on m’avait démolies le jour précédent.

Poursuivant la victoire que Dieu nous donnait, je me dirigeai, au petit jour, vers cette même rue où nous avions été défaits la veille : je la trouvai aussi vaillamment défendue, mais comme il y allait de notre honneur et de notre vie, attendu que la seule chaussée existante venait déboucher dans cette rue, et quoique pour l’atteindre il fallût passer huit ponts sur des fossés larges et profonds et s’emparer de toute une voie bordée de maisons et de tours, nous nous élançâmes avec tant d’ardeur, qu’avec l’aide de Dieu, nous nous emparâmes de quatre de ces ponts et que nous incendiâmes toutes les maisons, plates-formes et tours qui se trouvaient en arrière de ces ponts, malgré qu’ils eussent fortifié tous ces ponts avec d’épaisses barricades de briques et de terre, de manière à se mettre à l’abri de l’artillerie. Nous comblâmes les quatre fossés avec les briques, la terre des barricades, les pierres et les bois des maisons incendiées. Ce ne fut pas, il faut le dire, sans grand danger et sans avoir eu nombre de mes Espagnols blessés. Cette nuit je fis garder les ponts avec le plus grand soin, pour que les Indiens ne nous les reprissent point, le jour suivant je fis une nouvelle sortie, et Dieu nous accorda de nouveau une grande victoire ; malgré la multitude innombrable qui défendait les ponts, malgré les barricades qu’en cette nuit même, avaient construites les Indiens, nous les emportâmes toutes et nous comblâmes les fossés ; plusieurs de mes cavaliers qui nous suivaient arrivèrent même jusqu’à la terre ferme. Pendant que je m’occupais de réparer les ponts et de combler les fossés, on vint m’appeler en toute hâte, me disant que les Indiens qui attaquaient nos quartiers demandaient la paix et que leurs chefs m’attendaient pour traiter. Laissant là mes hommes, je m’en allai, suivi de deux cavaliers, voir ce que ces gens me voulaient, ils me dirent que, si je leur donnais ma parole que le passé leur serait pardonné, ils feraient lever le siège, rétablir les ponts, reconstruire les chaussées et se mettraient au service de Votre Majesté comme ils l’avaient fait avant leur révolte. Ils me prièrent en même temps de faire amener un de leurs prêtres que j’avais fait prisonnier et qui était le