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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/230

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quelque temps que cela pût nous coûter, les maisons de la ville, chaque fois que nous y pénétrerions ; de manière que nous ne ferions plus un pas en avant, sans tout raser devant nous, tout aplanir, et transformer les canaux et les tranchées en terre ferme. Je convoquai donc à ce sujet tous les caciques des nations amies, je leur fis part de ce que j’avais résolu et les priai de réunir le plus de manœuvres qu’ils pourraient et de me les envoyer munis de leur coas, instrument qui répond à la houe de nos agriculteurs ; ils me répondirent qu’ils le feraient avec le plus grand plaisir ; que c’était une mesure excellente, la meilleure pour ruiner la ville, ce que tous désiraient plus que toute chose au monde.

Trois ou quatre jours passèrent en préparatifs ; les Mexicains soupçonnaient bien que nous tramions quelque chose contre eux, et de leur côté, comme il nous parut plus tard, ils organisaient leur défense. Étant bien convenu avec nos amis que nous attaquerions la ville par terre et par eau, le lendemain, après avoir entendu la messe, nous prenons le chemin de Mexico : en arrivant à la barricade et à la tranchée qui précèdent les grandes maisons de la place, et au moment où nous allions attaquer, les Mexicains nous firent signe d’arrêter, qu’ils demandaient la paix. Sur mon ordre, les soldats mirent bas les armes, et je demandai que le commandant en chef de la ville vînt me parler et que nous suspendrions les hostilités. Sous le fallacieux prétexte qu’on était allé le chercher, ces gens me firent perdre plus d’une heure. C’est qu’en vérité, ils n’avaient nulle envie de faire la paix, ce qu’ils nous prouvèrent à l’instant en nous couvrant de flèches, de dards et de pierres. À cette vue, nous attaquâmes la barricade qui fut emportée, et en entrant sur la place, nous la trouvâmes hérissée de grosses pierres pour empêcher que les cavaliers ne pussent s’y mouvoir ; car c’étaient d’eux seuls qu’ils avaient quelque crainte ; nous trouvâmes deux autres rues également semées de pierres dans ce même but de paralyser les chevaux.

À partir de ce jour, nous aveuglâmes si complètement et si solidement les tranchées et les canaux que les ennemis ne purent les rouvrir ; nous commençâmes aussi à démolir les