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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/278

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rejoindre Alvarado ; je lui donnai une lettre pour ce capitaine, lui enjoignant de ne pas s’approcher des troupes de Garay sous quelque motif que ce fût, et cela pour prévenir toute rencontre entre les deux armées.

Le grand alcade devait notifier la cédule à Francisco de Garay avec ordre de me faire connaître sa réponse. Il partit en toute hâte et arriva dans la Huasteca, qu’Alvarado venait de quitter. Celui-ci apprit que j’étais resté à Mexico et que Diego Docampo était parti en mon lieu et place ; il lui fit savoir que l’un des capitaines de Garay nommé Gonzalo Dovallé parcourait le pays avec vingt-deux chevaux, pillant les villages, nous aliénant les Indiens et semant de guets les chemins où il devait passer ; Alvarado s’en offensa, pensant que Gonzalo Dovallé voulait l’attaquer ; il poussa donc en avant avec tout son monde et arriva à un village appelé Las Layas où il trouva Dovallé et sa troupe. Alvarado lui dit qu’il était au courant de ses faits et gestes, qu’il en était fort étonné, attendu que Cortes et ses capitaines n’avaient aucunement l’intention d’offenser les gens de Garay, mais au contraire, de les aider et leur prodiguer ce dont ils auraient besoin ; mais que, puisque les choses avaient pris une telle tournure, et pour prévenir tout scandale ou échauffourée entre les deux troupes, il voulait bien consentir à ce que les chevaux de ses hommes et leurs armes fussent mis sous séquestre jusqu’à règlement des difficultés pendantes.

Gonzalo Dovallé s’excusa, jurant qu’Alvarado avait été mal informé, mais acceptant les conditions qu’il lui imposait. Les deux troupes se réunirent donc, les hommes vivant et mangeant ensemble, sans qu’aucune contestation s’élevât entre eux. Dès que le grand alcade connut l’affaire, il se mit en route avec un de mes secrétaires nommé Francisco de Orduna pour rejoindre les capitaines Alvarado et Dovallé ; en arrivant, il fit lever le séquestre, fit rendre à chaque individu les armes et les chevaux, et assura Dovallé que je ferais mon possible pour lui être agréable, à la condition qu’il ne jetterait pas le trouble dans le pays ; en outre, il recommanda à Alvarado de vivre avec Dovallé en bonne intelligence et de ne se mêler en rien de ses affaires : ce qu’il fit.