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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/32

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d’arcs et de flèches, de lances et de boucliers, qui lui intimèrent l’ordre de quitter le pays, ou que, si nous désirions la guerre, nous la commencions tout de suite et qu’ils étaient gens à défendre leur village.

Le capitaine leur fit alors trois sommations, dont dressa procès-verbal l’écrivain public de Vos Altesses Royales qui l’accompagnait, affirmant qu’il ne voulait pas la guerre ; puis, voyant que les Indiens riaient bien résolus à nous empêcher de prendre terre, et qu’ils commençaient à nous lancer des flèches, il fit débarquer l’artillerie des brigantins et ordonna d’engager le combat.

Au débarquement, les Indiens nous blessèrent plusieurs hommes, mais finalement nous les abordâmes avec tant d’ardeur, pendant que nos amis qui les avaient tournés les attaquaient par derrière, qu’ils s’enfuirent et abandonnèrent le village dont nous nous emparâmes et où nous nous établîmes dans la partie la mieux fortifiée.

Le jour suivant, sur le tard, deux Indiens vinrent nous voir de la part des caciques et nous apportèrent divers bijoux d’or de peu de valeur, en disant au capitaine qu’ils les lui offraient pour qu’il s’en allât sans leur faire ni mal ni dommage. Le capitaine leur répondit, que quant au mal et au dommage il ne leur en ferait aucun ; mais que quant à quitter le pays, ils devaient savoir que, dorénavant, ils auraient à tenir pour maîtres et seigneurs les plus grands princes de la terre, qu’ils en étaient des vassaux et leur devraient obéissance et qu’en le faisant, ils obtiendraient de Vos Majestés mille faveurs et qu’elles les défendraient contre leurs ennemis. Ils répondirent qu’ils seraient heureux de le faire, mais cependant nous demandèrent encore de quitter leur pays. Nous restâmes amis et, cette paix conclue, le capitaine dit aux Indiens que les Espagnols se trouvaient sans vivres, n’en ayant point amené de leurs navires ; il les pria donc de leur en apporter pendant que nous resterions à terre. Ils promirent d’en apporter le jour suivant ; ils partirent et nous les attendîmes en vain deux longues journées pendant lesquelles nous manquâmes de toute chose. Le troisième jour, quelques Espagnols demandèrent au capitaine la permission