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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/395

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j’eusse à me charger du gouvernement et de la justice, emplois que j’exerçais précédemment par mandat de Votre Majesté, me représentant toutes les difficultés que pourrait soulever mon refus ; je refusai comme il appert du procès-verbal que j’en ai fait dresser ; ils revinrent à la charge, insistant sur d’autres inconvénients que ne manquerait pas de provoquer mon refus, et jusqu’à ce jour je m’en suis défendu, encore qu’ils pussent avoir raison.

Mais désirant avant tout que Votre Majesté soit bien convaincue de mon désintéressement comme de ma fidélité, vertus sans lesquelles les biens de ce monde n’auraient à mes yeux aucune valeur, j’ai plaidé de tout mon pouvoir pour que la charge fût confiée à Marcos de Aguilar, que le licencié Luis Ponce avait pour alcade principal, et je l’ai prié et je l’ai sommé d’avoir à l’accepter et d’en remplir l’office. Il s’y est refusé, disant qu’il n’y avait aucun titre, ce qui me peine plus que je ne saurais dire, parce que je désire avant tout que Votre Majesté connaisse exactement mes mérites et mes faiblesses ; car j’ai la conviction que j’ai mérité de Votre Majesté les plus insignes faveurs, non pour les qualités qu’à pu révéler ma petite personnalité, mais pour le dévouement absolu que j’ai si longtemps montré pour Votre Grandeur. Je supplie donc humblement que Votre Altesse ne permette pas qu’il y ait le moindre doute à cet égard et qu’elle reconnaisse hautement le bon et le mauvais de mes agissements, et comme il s’agit d’honneur, et que pour atteindre à cette gloire je me suis exposé à tant de fatigues et à tant de périls, je demande qu’il plaise à Dieu et à Votre Majesté, qu’il ne soit point permis à des langues mauvaises et jalouses de m’en pouvoir dépouiller. Je ne demande donc à Votre Majesté Sacrée d’autre récompense de mes services que d’en reconnaître la valeur, ne voulant point vivre sans l’estime de Votre Majesté.

Ainsi que je l’ai compris, Prince Très Catholique, depuis que je me suis occupé de la conquête de la Nouvelle-Espagne j’ai eu des rivaux et des ennemis puissants ; mais leur mauvaise foi et leurs calomnies n’ont pu prévaloir sur ma fidélité et les services que j’ai rendus ; désespérant de me renverser, ils ont eu