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Page:David - Les Patriotes de 1837-1838, 1884.djvu/128

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les patriotes

chose à donner que son dévouement. Épuisé par toutes sortes de privations, M. Pacaud lui dit un jour :

« — Mon ami, il est temps que je te débarrasse de ma personne ; va dire à monsieur le curé que je suis ici. C’est un prêtre et un gentilhomme : il ne me trahira pas.

« Le brave homme partit et s’acquitta de sa commission.

« Cela ne me regarde pas, répondit le curé ; seulement, tu diras à M. Pacaud que je pars ce soir pour un assez long voyage ; qu’il prie le bon Dieu pour moi !

« M. Pacaud comprit de suite l’ingénieux moyen que prenait le bon abbé pour lui être utile sans se compromettre. Le soir même, la ménagère le recevait au presbytère avec toutes les déférences imaginables ; et, pendant huit jours, cette maison hospitalière fut pour le pauvre proscrit un véritable paradis terrestre.

« Un soir, cependant — les huit jours étaient écoulés — il aperçoit sa propre voiture arrêtée en face du presbytère, sans conducteur. Qui l’avait amenée là ? La ménagère n’en savait rien. Alors M. Pacaud comprit qu’il était temps de déloger. Il se jette dans sa voiture et s’élance à fond de train sur la route de Saint-Hyacinthe. Lâcher les guides et se précipiter dans la porte de sa demeure, qu’il trouva heureusement ouverte, fut l’affaire d’un clin d’œil.

« Il se mit à la fenêtre ; un homme venait de s’emparer du cheval, presque à l’instant même où Comeau et ses recors, flairant quelque bonne aubaine, débouchaient sur la place.

« — À qui cette voiture ? cria celui-ci.

« — La jument appartient au collège, répondit l’homme, et la cariole à M. Pacaud. Mais comme il est absent, nous nous en servons quelquefois : je viens justement la lui remettre.

« Là-dessus il se met à dételer tranquillement,