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MÉMOIRES SECRETS

naissances qu’elle n’avait pu acquérir chez ses parens. On vient d’apprendre qu’elle épouse M. Dupuits de la Chaux, cornette de dragons, qui possède une terre en Bourgogne, près celle de Ferney, et a huit à dix mille livrés de rentes. En faveur de ce mariage, M. de Voltaire lui donne un contrat de 20,000 livres. Quelque temps auparavant il lui avait assure 1400 livres de rentes viagères : elle aura de plus le produit de l’édition des Œuvres de Corneille, à laquelle préside M. de Voltaire, et qu’il doit accompagner de ses remarques : ce sera un objet de plus de 20,000 écus.

3. — Il court une tragédie manuscrite de M. de Voltaire, intitulée Saül. Ce n’est point une pièce ordinaire, c’est une horreur dans le goût de la Pucelle, mais beaucoup plus impie, plus abominable. On n’en peut entendre la lecture sans frémir.

4. — Il court en manuscrit une comédie intitulée le Prince lutin, faite pour être jouée aux Italiens. On n’en parle que parce qu’elle est attribuée à M. le duc de Nivernois. Elle est très-médiocre, et paraît plutôt un ouvrage de société.

5. — M. Goldoni commence à déployer ses talens en faveur des Italiens : on a joué hier de lui l’Amour paternel. On prétend que cette pièce, accommodée au théâtre, est la même dont a été tiré le Père de Famille de Diderot. La comédie est froide et ne peut avoir un grand succès.

7. — M. de Bastide a composé des Contes dans le goût de M. de Marmontel : ils sont inférieurs pour la narration et les agrémens du style ; ils sont même pitoyables, à celui de la Petite Maison près, qui est très-bien et joliment fait. On prétend que sa femme y a beaucoup de