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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/187

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ou bigoterie ou afféterie : aimer cela, c’est aimer son abjection. En voici d’une autre sorte : nous allons visiter les malades ; si on m’envoie au plus misérable, ce me sera une abjection selon le monde, c’est pourquoi je l’aimerai ; si on m’envoie à ceux de qualité, c’est une abjection selon l’esprit, car il n’y a pas tant de vertu ni de mérite, et j’aimerai donc cette abjection. Tombant emmi la rue, outre le mal l’on en reçoit de la honte ; il faut aimer cette abjection. Il y a même des fautes esquelles il n’y a aucun mal que la seule abjection ; et l’humilité ne requiert pas qu’on les fasse expressément, mais elle requiert bien qu’on ne s’inquiète point quand on les aura commises : telles sont certaines sottises, incivilités et inadvertances, lesquelles comme il faut éviter avant qu’elles soient faites, pour obéir à la civilité et prudence, aussi faut-il quand elles sont faites, acquiescer à l’abjection qui nous en revient, et l’accepter de bon cœur pour suivre la sainte humilité. Je dis bien davantage : si je me suis déréglé par colère ou par dissolution à dire des paroles indécentes et desquelles Dieu et le prochain est offensé, je me repentirai vivement et serai extrêmement marri de l’offense, laquelle je m’essaierai de réparer le mieux qu’il me sera possible ; mais je ne laisserai pas d’agréer l’abjection et le mépris qui m’en arrive ; et si l’un se pouvait séparer d’avec l’autre, je rejetterais ardemment le péché et garderais humblement l’abjection.

Mais quoique nous aimions l’abjection qui s’ensuit du mal, si ne faut-il pas laisser de remédier au mal qui l’a causée, par des moyens propres et légitimes, et surtout quand le mal est de conséquence. Si j’ai quelque mal abject au visage, j’en procurerai la guérison, mais non