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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/110

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l’on dise alors pourquoi l’idée de fin s’impose nécessairement à l’esprit quand il s’agit d’expliquer l’être vivant. Lorsque l’esprit prête aux choses une forme d’unité qu’elles ne manifestent pas d’elles-mêmes, il a conscience que cette action est arbitraire ; mais, lorsqu’il affirme l’unité de fin propre à l’être vivant, il conçoit nettement que cette unité de fin fait plus que traduire ses dispositions subjectives, qu’elle est une propriété objective de l’être lui-même. — C’est nous, soutient-on, qui transportons aux choses les formes qu’elles présentent… Mais que peuvent donc être les choses sans les formes, ou les formes sans les choses ? Dans l’être vivant surtout, la réalité et l’idée sont indivisiblement unies (II, pp. 10 sq.). — Ainsi la finalité exprime l’essence même de la nature, et la nature matérielle, loin d’être plus fondamentalement expliquée que la nature vivante, s’explique au contraire à la façon de celle-ci ; et c’est dans cet esprit que Schelling tente la justification transcendantale des forces élémentaires, attraction et répulsion, admises par Kant. (Voir en particulier Ideen zu einer Philosophie der Natur, II, pp. 178 sq., 213 sq.)

À coup sûr, le développement de la pensée de Schelling dans ce sens n’est pas une simple déduction à partir de prémisses kantiennes, opérée sous l’influence de certaines idées de Fichte et sous la pression d’un besoin personnel de doctrine plus large et plus compréhensive : la Philosophie de la Nature de Schelling a été suscitée aussi par les découvertes ou les controverses du temps, qui, dans la théorie de l’électricité, les théories chimiques et biologiques, contribuaient à faire plus immense le champ d’action des forces invisibles et à rapprocher les propriétés des di-