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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/121

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main : il ne lui manque, hélas ! que le lien spirituel. » — Si, par rapport à la vieille métaphysique, l’empirisme a l’avantage de maintenir et de faire valoir les différences du réel, il a tout de même le défaut propre à cette métaphysique, — le défaut de convertir ces différences en déterminations abstraites, isolées ou isolables.

À cette seconde position de la pensée par rapport à l’objectivité appartient aussi la philosophie critique ; la philosophie critique a cela de commun avec l’empirisme qu’elle ramène tout savoir à l’expérience, et qu’elle tient les connaissances, non pour des vérités à parler rigoureusement, mais pour des connaissances de phénomènes. Elle se distingue néanmoins de l’empirisme en ce qu’elle marque fortement le caractère subjectif de ce qui est simplement perçu par opposition à la pensée, dont l’universalité et la nécessité constituent l’objectivité proprement dite. Cependant l’objectivité kantienne reste encore subjective, en ce sens que les pensées, bien qu’elles soient, d’après Kant, des déterminations universelles et nécessaires, n’en sont pas moins invinciblement nos pensées, et restent séparées par un abîme infranchissable des Choses en soi. Au contraire, ce qui constitue la vraie objectivité de la pensée, c’est que les pensées ne sont pas simplement nos pensées, c’est qu’elles sont aussi l’en soi des choses et de ce qui est objectif.

Mais tâchons de saisir plus en détail certains traits de l’œuvre de Kant. Et d’abord ç’a été à coup sûr un très important progrès que d’avoir soumis à un examen méthodique les déterminations de l’ancienne métaphysique, d’avoir affirmé qu’elles ne devaient pas être l’objet d’une con-