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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/139

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car la synthèse, c’est l’union des opposés, et les opposés, eux aussi, ne sont saisis comme tels que par une action du Moi, et pas plus que l’antithèse n’est possible sans la synthèse, et la synthèse sans l’antithèse, l’une et l’autre ne sont possibles sans une thèse, à savoir sans une position absolue par laquelle le Moi se pose sans s’égaler ou sans s’opposer à rien d’autre. Et cela veut dire que toutes les oppositions doivent être résolues, tant qu’il y a des oppositions. Si la nécessité d’opposer et de concilier s’appuie immédiatement sur le troisième principe, la nécessité de concilier en général, ou plutôt de ramener à l’unité, s’appuie sur le premier principe. La forme du système est fondée sur la première synthèse ; mais qu’il doive y avoir un système, c’est ce qui est fondé sur la thèse absolue. (Grundlage der gesammten Wissenschaftslehre, I, pp. 110 sq.)

Ainsi, nous déclare Fichte, est résolue de la façon la plus satisfaisante la fameuse question qui domine la Critique de la Raison pure ; comment les jugements synthétiques a priori sont-ils possibles ? Le troisième principe de la Doctrine de la Science nous fournit le modèle du jugement synthétique rattaché à une action nécessaire de l’esprit. Ce sont, d’ailleurs, ces actions nécessaires qui, suivies dans leur développement, constituent les formes de tous nos jugements, les catégories : les catégories kantiennes de la qualité, réalité, négation, limitation, expriment bien l’action de l’esprit dans la position successive de ces trois principes.

Mais voyons plus précisément en quoi la conception kantienne des jugements synthétiques a priori a préparé la méthode de Fichte, mais par quoi aussi la méthode de Fichte diffère de cette