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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/15

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trines apparemment idéalistes qu’il voyait aboutir par la rigueur de déductions tout ensemble formalistes et passionnées à ce qu’il fallait bien appeler des « énormités », au sens étymologique de ce mot, des « atrocités », selon une expression qui s’appliquait d’autant plus sévèrement que leurs auteurs se glorifiaient des violences en raison des succès profitables dont ils croyaient enrichir leur prestige et satisfaire leur esprit de domination au nom d’une culture plus avancée.

4. Nous voyons déjà quelles leçons de réalité intellectuelle et morale, quel enseignement approprié Delbos sut tirer de l’expérience déjà immense des années 1914-1916, auxquelles son cœur généreux ne put survivre. En confrontant ses espoirs d’alors avec les insuffisances intellectuelles et morales des vingt années qui suivirent, nous pouvons un peu mesurer les tristesses, les angoisses qui eussent été les siennes devant le spectacle qu’aujourd’hui l’humanité s’offre à elle-même. Mais aussi, plus qu’autrefois encore, il eût tenu à répéter qu’en dernière analyse c’est une question de vérité foncière dont nous avons à prendre conscience. Toujours fidèle à discerner les déviations intellectuelles et les mouvements collectifs des pensées plutôt qu’à incriminer les défaillances morales dont nous ne pouvons apprécier la gravité dans le secret des consciences, il eût sans aucun doute tiré des crises présentes et des dangers systématiques auxquels elles exposent l’humanité les enseignements de plus en plus précisés qu’elles imposent à la méditation spéculative du philosophe comme à l’action militante des hommes de courageuse raison.

Loin donc de renoncer au projet conçu après