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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/164

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Et il y a, en outre, dans la doctrine de Kant, d’autres éléments qui pouvaient rendre cette notion de synthèse plus effective, et l’affranchir des conditions que lui imposait une relation nécessaire aux objets sensibles. Un instinct spéculatif l’avait averti de la portée singulière de ce principe de la trichotomie ou de la triplicité qui est si fermement admis pour vrai par le Pythagorisme, le Néo-Platonisme et le Christianisme ; il avait entrevu que dans chaque ordre des catégories la première est positive (thèse), la seconde négative (antithèse), et la troisième la synthèse des deux premières. Une autre conception de Kant qui, si elle eût été plus complète ou plus exacte, lui eût permis de faire fructifier cette induction, c’est celle qui consiste à avoir repris et remis en lumière la dialectique. La dialectique n’est nullement, en effet, quelque chose de nouveau dans la philosophie. C’est à Platon qu’en est attribuée l’invention, et il est vrai que c’est dans la philosophie platonicienne que la dialectique se produit sous une forme véritablement scientifique et objective. Chez Socrate, elle garde une forme toute subjective encore : c’est l’ironie dirigée contre la conscience commune ou contre les sophistes et qui consiste à faire ressortir la fausse apparence de certaines solutions plutôt qu’à considérer les choses mêmes dans les difficultés et les problèmes qu’elles soulèvent. Au contraire, chez Platon, dans le Parménide, par exemple, il s’agit de montrer comment le multiple dérive de l’un, comment l’un est déterminé par le multiple. — Donc Kant a eu surtout le mérite d’avoir tiré la dialectique de l’oubli, et cela par ses antinomies de la raison. Il a montré avec une remarquable profondeur que ces raisonnements qui s’opposent