Aller au contenu

Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de contradiction tel que le conçoit l’entendement qui laisserait le monde et la pensée livrés à la contradiction, — à la contradiction inévitable et insoluble. Car tout concept fixé par l’entendement évoque nécessairement l’idée de son contradictoire, et l’opposition des deux concepts reste ainsi une opposition exclusive, une opposition sans relation. Au contraire, l’unité des contradictoires que pose la raison, c’est l’unité qui supprime des contradictoires ce qu’ils ont d’exclusif, pour en faire les moments d’une synthèse réelle. La contradiction, voilà ce qui met le monde en mouvement, et il est vraiment plaisant de dire que la contradiction ne saurait être pensée ; mais la contradiction voit ses éléments abstraits et isolants supprimés, ses éléments concrets maintenus et élevés dans l’unité plus haute de la raison spéculative. (Encyclopædie, 119, t. VI, pp. 238-242.)

Mais si la contradiction doit être résolue, ce n’est pas à dire pour cela qu’elle n’existe pas, ou qu’elle ne s’offre qu’à titre d’apparence. Ç’a été le défaut de la dialectique de Fichte de se contenter de contradictions apparentes et de pouvoir ainsi se contenter d’une limitation pour opérer la conciliation. D’abord, c’est l’entendement, nous l’avons vu, qui est cause que les concepts posés comme déterminés appellent pour se compléter, pour corriger la négation qu’ils enveloppent, les concepts contradictoires. Or, si la pensée selon l’entendement est une pensée inférieure et subordonnée, elle n’en a pas moins sa valeur et ses droits ; c’est à elle qu’il revient de faire disparaître de la conscience l’obscurité et l’indétermination, d’arrêter la connaissance comme l’action sur des objets définis. Pour connaître, dans la nature,