Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les forces, les espèces, les propriétés, il faut un moment les fixer et les isoler. Celui qui veut accomplir quelque chose de grand doit, comme dit Gœthe, savoir se limiter ; car celui qui veut tout ne veut réellement rien et n’accomplit rien. Donc, de cet entendement qui, par sa façon de déterminer les concepts, est cause de la contradiction, il y a une justification et une raison d’être. (Encyclopædie, § 80, t. VI, pp. 147 sq.) En outre, il faut bien se représenter que la négation qui correspond au moment dialectique n’est pas une négation abstraite, la simple suppression de l’affirmation positive dont elle est issue, mais qu’elle a un contenu particulier bien à elle et qu’elle est à cet égard un nouveau concept. Ce n’est, au reste, qu’à cette condition qu’il peut y avoir progrès. (Wissenschaft der Logik, III, p. 41.) D’autre part, il est indispensable de bien entendre en quel sens la synthèse est l’unité de la thèse et de l’antithèse ; elle est le résultat, sans doute, et Hegel emploie le mot, mais non pas dans le sens que l’on serait tenté peut-être de lui donner ; elle n’est pas, vis-à-vis de la thèse et de l’antithèse, comme un produit qui serait déjà tout donné dans ses facteurs ; il serait plus exact de dire que ce sont ses apparents facteurs qui sont ses produits. Ce ne serait qu’au cas où le développement de la pensée serait purement analytique qu’il faudrait prendre la synthèse comme engendrée par la contradiction de la thèse et de l’antithèse, au lieu que c’est la vérité propre à la synthèse qui, avant même qu’elle soit clairement connue, cause la position de la thèse, de l’antithèse et de leur rapport. La synthèse est donc vraiment créatrice ; elle est la raison des moments qu’elle se subordonne et qu’elle comprend, et qui