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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/194

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science purement et exclusivement théorique. (Ueber philosophisches Studium, Herbarts kleinere Werke, I, p. 143 ; et Allgemeine Metaphysik, Édition Hartenstein, I, p. 132, etc.)

Le problème de la Métaphysique est bien celui-là même qu’avait indiqué Kant : expliquer comment l’expérience est possible, ou, en termes plus herbartiens, expliquer comment il est possible de penser le donné de telle sorte que les concepts que nous avons soient également d’accord avec l’expérience et avec la logique. Par opposition au dogmatisme antérieur, Kant a justement soutenu que l’ensemble de tout le donné, ce que l’on appelle la nature, aussi bien que tout ce que nous connaissons, ne renferme que des phénomènes ; par opposition à l’idéalisme, il a justement distingué les phénomènes des choses en soi et par là il a été conduit à reconnaître que, de même que la fumée est l’indice du feu, l’apparence est l’indice de l’être. La matière de l’expérience ne consiste que dans des sensations, et les sensations ne sont que des états de conscience. Dira-t-on, par conséquent, que rien de réel ne nous est donné, que par suite rien n’est, qu’il n’y a pas d’être ? Mais, s’il est aisé d’énoncer de telles propositions, il est plus malaisé de s’y tenir ; car l’apparence même ne se laisse pas réduire à rien, et nous avons beau dire à chaque phénomène qui apparaît : « Tu n’es rien, tu ne peux rien », il est impossible de résister indéfiniment à ce retour persévérant des apparences ; il est impossible de ne pas se demander : « D’où l’apparence peut-elle bien venir ? » Certes, il n’y a pas lieu de tenir pour réel ce qui apparaît, et tel qu’il apparaît. Mais il faut poser quelque chose, telle chose pour telle apparence, telle autre chose pour telle autre.