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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/26

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ses successeurs, c’est presque toujours déterminer pour une part la genèse de leur pensée.

En étudiant ainsi, comme nous nous le proposons, la fortune historique, les prolongements et les transformations de la doctrine de Kant, nous pourrions faire naître une illusion qu’il importe de dissiper d’avance. Il nous arrivera presque constamment de montrer les idées kantiennes en mouvement logique, pour ainsi dire, vers les formes nouvelles qu’elles revêtent ou les conséquences qu’elles engendrent chez les successeurs de Kant. Mais il doit rester bien entendu qu’elles n’ont pas suivi cette voie par une sorte de nécessité propre, excluant toute autre possible, et indépendante des dispositions d’esprit de ceux qui les ont fait marcher dans ce sens. En outre, il n’est pas dans notre intention de laisser croire que la formation des doctrines successives n’est que la réalisation d’une dialectique interne amenant à l’état explicite des conceptions implicitement préexistantes. Nous croyons au contraire très fermement à l’action des causes psychologiques et sociales de toute sorte qui, parmi les conséquences idéalement possibles d’une philosophie, déterminent celles qui sont effectivement tirées dans l’histoire. Donc, quand il nous arrivera d’essayer de décrire le processus logique qui va de la pensée de Kant à celle de ses successeurs, il nous faudra toujours corriger cette description par l’idée que ce processus logique, si essentiel qu’il soit, n’a pas eu d’existence réelle hors des esprits qui l’ont plus ou moins consciemment défini, qu’il n’est point doué par lui-même d’une vertu créatrice complète et opérant en soi.

Ce qui frappe tout d’abord : Kant a nié ou passe pour avoir nié la légitimité de la Métaphysique.