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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/46

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celui-ci : nous n’avons jamais affaire à des objets pris en eux-mêmes, mais simplement à des représentations. Or, c’est abandonner l’esprit du système que parler d’objets qui produisent des impressions sur les sens, provoquent ainsi des sensations et déterminent enfin des représentations ; car, de quelque façon qu’on les entende, — dans le sens empirique ou dans le sens transcendantal, — ces objets sont impossibles à admettre. — Dans le sens empirique ? Mais les objets empiriques ne sont rien hors de nous, indépendamment de nous ; ils se confondent avec nos représentations mêmes, et si l’on veut dire qu’ils ne sont objets que par quelque élément qui s’ajoute à nos intuitions sensibles, cet élément additionnel n’est, de l’avis même de Kant, qu’un concept, qu’une catégorie venue de l’entendement. — Dans le sens transcendantal ? Mais il nous est en lui-même entièrement inconnu ; nous ne pouvons ni dire ni savoir s’il est cause et comment, s’il agit et comment il agit. Même, puisqu’il est, selon des formules de Kant, un concept purement problématique et qu’il dépend à ce titre des formes subjectives de notre pensée, il reste à l’état de conception pure et simple sans fondement réel. — Cependant, si contraire qu’il soit à l’esprit du Kantisme de poser des objets en eux-mêmes et de telle sorte qu’ils fassent des impressions sur nos sens, on ne comprend pas comment sans cette supposition la philosophie kantienne pourrait se donner accès à elle-même. Car que peut signifier le mot sensibilité si l’on n’entend point par là un intermédiaire réel entre quelque chose de réel et quelque chose de réel, si dans ce concept on ne fait entrer les concepts d’extériorité et de liaison, d’action et de passion, de causa-