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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/99

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un acte de libre production qu’il se pose, et c’est par une intuition intellectuelle qu’il se connaît. Nous avons vu aussi de quel procédé d’abstraction portant sur le contenu de l’expérience résulte l’établissement de ce premier principe, et comment par là est fondé le système de l’idéalisme, en opposition avec le seul autre système possible, qui est le système du dogmatisme. Il y a une doctrine que Fichte identifie volontiers avec le dogmatisme, comme terme antithétique de la philosophie critique, c’est la doctrine de Spinoza. Et dans sa Correspondance avec Fichte, Jacobi disait de l’idéalisme de Fichte que c’était un Spinozisme retourné : Herbart a dit de la philosophie de Fichte qu’elle est une traduction idéaliste du Panthéisme de Spinoza (Ueber Fichte’s Ansicht der Weltgeschichte, S. W., XII, p. 259).

Depuis la fameuse polémique de Mendelssohn et de Jacobi au sujet du Spinozisme prétendu ou réel de Lessing, Spinoza avait cessé d’être celui que, selon l’expression de Hegel, on traitait comme un chien mort. Jacobi, avec ses Lettres sur la Doctrine de Spinoza (1785), avait puissamment contribué à ce réveil de la doctrine spinoziste, — que pourtant il combattait. Mais il avait remarquablement discerné le caractère religieux, si longtemps méconnu, du Spinozisme, et en même temps il avait découvert à quel point le Spinozisme pouvait être représentatif de tout un ensemble de philosophies, — de toutes les philosophies de l’entendement. Dès que l’on veut expliquer intellectuellement tout le réel, il est impossible logiquement d’admettre l’existence d’un Dieu personnel hors du monde et la liberté de la volonté ; et le grand mérite du Spinozisme, c’est d’avoir mis en pleine lumière l’inévitable