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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/231

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croulants et mutilés, ces fissures béantes comme des ulcères, ces débris nus et sales, ces gazons brûlés, roussis, déchiquetés, portent tellement en eux les traces d’une désolation sinistre qui vous déchire l’âme, qu’en quelques minutes les larmes vous gagnent au récit de la bien lamentable histoire qui se rattache aux ruines que vous avez sous les yeux.

Cette histoire, la voici :

Il y a de cela plusieurs siècles, cette même tour, dont il ne reste plus que d’informes vestiges, faisait partie de l’antique et superbe manoir des comtes de Givrion.

Dans ce château vivait, avec sa jeune femme, la belle Caroline d’Hauterive, d’une fortune et d’une naissance au moins égales aux siennes, l’unique héritier de cette illustre famille, le très-noble et très-puissant Henri de Givrion.

Rien ne saurait faire comprendre le charme répandu sur l’existence de ces deux jeunes époux. Pour eux le mariage ne paraissait devoir être qu’une incessante succession de ravissements inconnus, de félicités indicibles. Deux enfants beaux comme des anges étant venus par leur naissance mettre le comble à leurs vœux les plus chers, il leur semblait n’avoir plus rien à demander à Dieu, sans songer dans leur bien naturelle ignorance des choses de