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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/33

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dans un cimetière… Alors une voix grêle et sinistre, semblable aux soupirs du vent qui pleure entre les vitraux brisés d’une chapelle en ruines, s’élevait jetant dans la nuit les notes de sa voix étrange et lugubre, — véritable chant de l’autre monde. — La troupe infernale répondait en chœur, faisant bourdonner ses ailes avec plus de rapidité que les ailes du vampire prêt à sucer le sang de sa victime ; horrible, exécrable harmonie plus effrayante encore que les rires des sorcières dans la chevelure des grands chênes ; et la ronde revenait, se ranimant sans cesse, se pressant, se heurtant dans l’espace, rapide, hurlante, échevelée, entraînée par un mouvement frénétique, tandis que les démons frappaient la barque de leurs jambes vides et sonores comme les os d’un squelette. Leurs voix discordantes sifflaient, hurlaient, rugissaient, se fondaient, se mêlaient, s’effaçaient l’une dans l’autre au milieu des rires affreux, des cris aigus, des lugubres modulations, des notes glapissantes de ce concert sans pareil.

Le cœur et le front glacés, aussi pâle qu’un cadavre étendu dans son linceul, immobile de stupeur et d’effroi, Limbey voulut fuir, regagner le rivage… Mais en vain, ses jambes flageolaient ; sa poitrine oppressée se souleva comme un soufflet de forge ; ses yeux se brouillèrent comme pressés