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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/38

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âme, deux femmes marchaient lentement, assez près du rivage pour qu’un dernier effort des vagues qui venaient s’y endormir mouillât leurs pieds ; toutes deux avaient sucé la vie aux mamelles fécondes du ciel méridional. Le même soleil ardent et rougeâtre avait bruni leur chevelure ; mais l’une, à l’automne de son existence, avait goûté de tous les fruits la saveur amère et douce ; l’autre, au printemps, n’avait vu éclore jusqu’ici que des fleurs.

Seize ans étaient son âge, Maria son nom.

— Mère, dit-elle après un assez long silence ; mère, c’est ici que je le rencontrai pour la première fois.

— Qui ? lui ? murmura celle à qui l’on venait de donner le nom de mère.

— Oh ! celui qui fait mes jours si beaux et si tristes ! celui dont les yeux sont ma lumière maintenant ; celui dont la présence me fait, je ne sais pourquoi, monter soudain ma pudeur au front et dont la moindre absence me laisse aussitôt rêveuse et mélancolique ; celui…, ce marin étranger enfin, que vous avez secouru, ma mère, ce jeune homme pâle qu’un naufrage avait déposé sur ces côtes et que notre chaume a abrité ; comprenez vous, ma mère ?

— Tu l’aimes donc ?

— Oh ! demandez plutôt au matelot s’il n’aime