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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/54

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mieux de belles illusions pleines de jeunesse et d’impatience, désireuses de jouir au plus vite de toutes les merveilles de la nature, de toutes les richesses de l’inconnu. À vingt ans on aime par caprice et surtout par curiosité. On aime pour savoir ce que c’est que l’amour, pour explorer ce monde nouveau entr’ouvrant devant vous les portes de l’espérance et de la chimère. Et puis Albert de L. — c’était le nom de l’inconnu — avait plus qu’aucun autre l’âme sensible et passionnée, car il était peintre et poëte.

Son premier mouvement fut d’adresser à la Fée Blonde quelques mots d’amour et de respect tracés à la hâte sur une des feuilles de son porte-cigare ; le second de la suivre à distance avec une indifférence affectée. Cette dernière résolution, à laquelle il s’arrêta, fut d’autant plus heureuse qu’au lieu d’aller à Bayonne, comme elle en avait fait le projet, la Fée Blonde ne tarda pas à donner l’ordre de rentrer à toute vitesse à l’hôtel, tant il lui tardait d’être seule avec sa pensée, tant elle se sentait sous le coup d’un je ne sais quoi d’étrange, d’indéfinissable qu’elle ne pouvait s’expliquer à elle-même. C’était de la joie, c’étaient des larmes, quelque chose de triste et de gai tout ensemble, une émotion vague, insaisissable, une sorte de tremblement nerveux jusqu’alors inconnu pour elle.