Aller au contenu

Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/196

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


L’idée de mouvement n’est pas d’abord pour nous cette idée composée dont nous nous rendons compte, en disant que le mouvement est l’état d’un corps qui passe d’un lieu dans un autre. Un lieu est une portion de l’espace ; l’idée de lieu dérive de celle d’étendue, que nous n’avons pas encore. Le mouvement n’est donc d’abord pour nous qu’une sensation simple, une manière d’être. Je me meus, je le sens, et voilà tout. Voyons ce qui en arrive.

Je m’agite en divers sens, je n’éprouve aucune opposition ; tout ce que je rencontre, fût-ce un fluide éthéré, de la lumière, de l’air même, n’est rien pour moi, puisqu’il ne me donne pas le sentiment de résistance à ma volonté : c’est le néant absolu ; je ne sais pas même que c’est là ce qu’à tort ou à raison j’appellerai le vide quand je connaîtrai le plein ; je ne sais pas que je traverse ce vide, puisque j’ignore qu’il est étendu et qu’il y a au monde quelque chose qui soit étendu.

Bientôt le mouvement que je voudrais continuer, qui n’est qu’une manière d’être que je voudrais prolonger, cesse malgré moi ; ce qui l’arrête n’est pas moi, mais c’est