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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/335

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binaisons qui s’opèrent en nous et des mouvemens internes qu’elles nécessitent, est devenue vraiment innombrable, il est bien difficile que ces combinaisons ne se nuisent pas tout en s’entr’aidant, et qu’il ne s’établisse pas entr’elles des liaisons vicieuses. Je suis convaincu même que cette dernière circonstance est une des causes qui fait qu’en général c’est chez les nations les plus éclairées, dans l’âge où l’on combine le plus d’idées, et dans la classe des hommes qui ont le plus exercé leur esprit, que l’on trouve les exemples les plus fréquens de démence ; et que l’on observe que les hommes les plus sujets à ce malheur sont ceux qui se livrent le plus avidement aux impressions qu’ils reçoivent, tandis que ceux dont l’occupation habituelle est de se rendre un compte soigneux de leurs pensées en sont presque entièrement exempts[1].

  1. Cette réflexion m’est suggérée par la lecture du Traité de l’Aliénation mentale, qu’a publié M. Pinel : on ne saurait trop en recommander la lecture. En expliquant comment les fous déraisonnent, il apprend aux sages comment ils pensent ; il prouve que l’art de guérir les hommes en démence n’est autre chose que celui de manier les passions et de diriger les opi-