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Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/10

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de bonté, replaça la voile sur ce visage pâle et se mit à pleurer.

— Vous écouterez ma prière, — lui dit la dame. — Vous ne serez point insensible aux angoisses d’une infortunée qui vous supplie ?…

— Oh ! chère… bien chère… — s’écria la bonne Sally. — Que faut-il vous dire ? Et que puis-je faire ? Ne parlez pas de prière, au moins… Nos prières ne doivent s’élever que vers notre Père à tous : on n’en adresse point à une pauvre fille comme moi. D’ailleurs je vais quitter l’Hospice ; je n’y resterai plus que six mois, jusqu’à ce qu’une autre jeune femme ait été mise au courant de mon service et soit prête à me remplacer. Je vais me marier, madame. Je ne serais pas sortie ce soir si mon Dick… c’est celui que je dois épouser… n’était malade. J’aiderai sa mère et sa sœur à le veiller cette nuit. Ne vous affligez pas si fort.

— Ah ! bonne Sally… chère Sally… vous êtes pleine d’espérance, et depuis longtemps l’espérance s’est éteinte devant mes yeux. La vie s’offre à vous belle et paisible, vous deviendrez une femme respectée et sans doute une tendre et orgueilleuse mère. Vous êtes une femme aimante et vivante… Et moi, il faut que je meure !… Écoutez, écoutez-moi, je vous en prie.

— Mon Dieu ! — s’écria Sally, — que dois-je donc faire ? Voyez comme vous vous servez de mes propres paroles contre moi. Je vous ai dit que j’étais sur le point de me marier, afin de vous faire mieux comprendre que j’allais quitter cette maison et que je ne