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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/141

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pratique du chant polyphonique, venaient apprendre l’art d’écrire. À chaque illustre maître, ses biographes ont attribué un cortège d’élèves dont parfois la date de naissance ne s’accorde point avec celle du décès de leur prétendu professeur. L’existence à Rome d’une école de composition, ouverte par le Français Claude Goudimel et où se serait, entre autres, formé Palestrina, est également controuvée. Mais des témoignages existent pour prouver que les leçons de certains autres maîtres attiraient souvent de fort loin les jeunes compositeurs. À Venise, Adrien Willaert († 1562), et plus tard Giov. Gabrieli († 1612) ; à Rome, Gio. Maria Nanino (†1607) et, dans le xviie s., Carissimi ; à Amsterdam, Sweelinck († 1621) se rendirent célèbres par leur E. autant que par leurs ouvrages. C’est pour s’instruire sous Gabrieli que le landgrave de Hesse envoya Schütz à Venise. Lorsque la renommée de Lulli fut établie à Paris, on vit venir de l’étranger des jeunes gens, tels que l’Alsacien Muffat, l’Allemand Cousser, qui se faisaient admettre dans son orchestre pour recevoir son E., et qui allaient ensuite en répandre l’esprit, par leurs œuvres, hors de nos frontières. L’E. instrumental avait été longtemps considéré comme celui d’un métier manuel. Les ménestriers et joueurs d’instruments, organisés en corporation depuis le xive s., se faisaient recevoir « maîtres » et formaient des « apprentis ». Par privilège ou par tradition, la coutume se maintint longtemps de conclure entre professeur et élève un contrat à forfait. Un document de 1617 nous montre, par exemple, l’organiste Raquet s’engageant, moyennant la somme nette de 100 livres tournois, à enseigner en 18 mois le jeu de l’orgue, du luth, le chant et « la partition de musique », à un jeune homme qui viendra eux fois chaque jour à son domicile étudier sous sa direction. Le régime ordinaire des amateurs était celui des leçons particulières ; pour leur faciliter l’accès de la musique et « s’attirer pratique », les maîtres s’ingéniaient, comme aujourd’hui, aux simplifications. Les Leçons de clavecin, de Bemetzrieder (1771), dont le texte fut tout au moins retouché et inspiré par Diderot, et la Méthode simple pour apprendre à préluder, de Grétry (1801), montrent à quel faible niveau de talent ou de savoir on se contentait de prétendre. Rameau, en 1737, avait essayé d’ouvrir un cours de composition pour les amateurs, promettant de les « mettre au fait de la science de l’harmonie et de sa pratique » en six mois, à trois leçons de deux heures par semaine ; en 1757, un certain Dupuits tenait une « école publique de musique » où se donnaient chaque jour des leçons « dans les différents genres », avec un cours de musique d’ensemble trois fois par semaine. Jusqu’à l’établissement de l’École royale de chant (1784), qui avait pour mission de préparer ses « sujets » pour l’Opéra, l’État ne s’occupa point, en France, de l’E. musical. La fondation du Conservatoire (1795) inaugura un nouvel ordre de choses et un mouvement rapidement étendu à toutes les nations de l’Europe. Sans devenir nulle part un monopole d’État, l’E. musical tendit à s’organiser d’après un modèle officiel. En même temps, l’intérêt des pouvoirs publics fut attiré vers sa propagation dans les milieux populaires. L’impulsion féconde du grand pédagogue suisse Pestalozzi s’était étendue jusque dans le domaine musical, et son compatriote Hans Nægeli avait, depuis 1809, adapté ses vues au chant scolaire. Bientôt on vit surgir de toutes parts des méthodes destinées à en faciliter la diffusion. La notation chiffrée, en faveur de laquelle avaient eu lieu, longtemps auparavant, des entreprises avortées, reparut et réussit à s’implanter en Allemagne avec Natorp, en France avec Galin et ses continuateurs, Pâris et Chevé. Elle eut pour équivalent, en Angleterre, la méthode appelée Tonic sol-fa, qui repose également sur un système de transposition et qui offre, avec les mêmes avantages de rapidité et de facilité, le même irrémédiable défaut, qui est d’acculer l’élève à une impasse d’où il ne peut sortir, pour prétendre à un niveau plus artistique, qu’en recommençant son éducation musicale par la notation ordinaire et universelle. Le dévouement de Bocquillon-Wilhem se tourna vers l’E. du chant en chœur. Ses efforts, parallèles à ceux de Choron, portèrent leurs fruits les plus visibles par la création de l’Orphéon. Le plan d’études fixé par l’arrêté du 18 janvier 1887, pour les écoles primaires en France, prévoit, depuis la classe enfantine, l’E. de petits chants, appris par l’audition, depuis la classe élémentaire, l’E. de la lecture des notes, en clef de sol, depuis le cours moyen, l’exercice de la dictée et, dans le cours supérieur, la lecture en clef de fa, les éléments de la tonalité et l’exécution de morceaux à deux parties vocales. Les épreuves pour l’obtention du brevet de capacité compor-