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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/245

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des M. instrumentales n’en modifient pas le plan, mais le style. C’est ainsi que les deux plus célèbres M. funèbres, celles de la Symphonie héroïque, de Beethoven (1803) et celle qui fait partie de la 12e Sonate pour piano, de Chopin (1840), se conforment à la symétrie pour ainsi dire obligatoire du da capo, en animant cette forme d’une expression intense de gravité douloureuse ou de morne désolation. Entre les M. religieuses, aucune ne surpasse la noble gravité de celle d’Alceste, de Gluck (1776). La M. du Songe d’une nuit d’été, de Mendelssohn, que l’on a coutume d’intituler M. nuptiale est une brillante musique de cortège dans le style d’opéra et dans la forme à couplets. On a traduit inexactement par M. aux flambeaux le titre de Fackeltanze de Meyerbeer, sortes de danses composées pour des cérémonies traditionnelles à la cour de Prusse et dont l’une, au moins, a été jadis entendue dans les concerts. || 2. On appelle M. harmonique une série de progressions, ou répétitions d’une formule harmonique à un intervalle supérieur ou inférieur. La M. harmonique est dite ascendante ou descendante, selon le sens où s’effectuent les progressions, unitonique, lorsqu’elle s’accomplit sans changement de ton, modulante, lorsqu’elle parcourt plusieurs tons avant sa terminaison. Afin de conserver la symétrie des parties harmoniques de progression en progression, on y permet l’usage d’intervalles ordinairement défendus, tels que les octaves et les quintes cachées. || 3 On donnait avant le xviie s. le nom de M. aux touches du clavier.

Marcia, n. f. ital., = marche. Voy. Marche, 1.

Marquer, v. tr. Mettre en relief, dans l’exécution, par une intensité spéciale de sonorité, les notes d’une mélodie ou d’un fragment mélodique essentiel. On les désigne dans la notation par des signes d’accentuation Λ et > ou par le mot ital. marcato.

Marseillaise, n. f. * Chant national français, composé le 25 avril 1792 par Rouget de l’Isle, officier de la garnison de Strasbourg, comme Chant de guerre pour l’armée du Rhin. Exécuté bientôt après à Paris par les volontaires marseillais lors de leur arrivée dans la capitale, il y reçut le nom d’Hymne des Marseillais ou Marseillaise, qu’il a toujours conservé. || La M., malgré l’emploi qui en a été fait dans diverses révolutions, n’a jamais été destinée à être un hymne révolutionnaire : c’est un chant patriotique, écrit sous l’émotion de l’agression prussienne, et visant à soutenir ou à enflammer le courage de la garnison de Strasbourg ; il est bon de rappeler les circonstances de cette création. Rouget de l’Isle, officier d’artillerie, alors en garnison à Strasbourg, était l’un de ces amateurs que l’on rencontre de tous temps dans les salons ; doué quelque peu pour la poésie légère, dont il a laissé un certain nombre de pièces, assez faibles d’ailleurs, et jouant médiocrement du violon, il fut engagé par le baron Dietrich, maire de Strasbourg, chez qui il passait la soirée du 24 avril 1792, à écrire un hymne patriotique pour les soldats. Rentré chez lui, il se mit à l’œuvre, et, dès le lendemain matin, de bonne heure, apportait chez Dietrich le résultat de son travail, paroles et musique, que Mlle Dietrich accompagna séance tenante au piano, l’auteur jouant l’air sur son violon. On a pu établir avec certitude, grâce aux recherches minutieuses de MM. Constant Pierre et Julien Tiersot, au milieu de nombreux récits controuvés et popularisés, et l’origine de la M., et les sources d’inspiration de Rouget de l’Isle. Comme paroles, la proclamation que le maire de Strasbourg venait de faire afficher sur les murs de la ville lui servit de plan et de base : des expressions entières de Dietrich passèrent ainsi dans le chant de guerre de l’officier. Quant à la musique, on a beaucoup discuté pour savoir si Rouget de l’Isle, à son insu ou avec intention, n’a pas utilisé une composition de Grisons, maître de chapelle de Saint-Omer, qui avait remis en musique, pour chœur à quatre voix et orchestres le cantique des jeunes Israélites dans Esther, « Roi, chassez la calomnie », dont des fragments entiers sont communs à ce chœur, et à la M. Mais on a remarqué à juste titre que si Grisons a été maître de chapelle de cette église plusieurs années avant la Révolution, (au moins de 1784 à 1787), il y a aussi été chargé de la musique lors de l’institution des « fêtes décadaires ». Or, son chœur ne figure pas dans les anciens catalogues de ses œuvres, que possédait la maîtrise de Saint-Omer, avant la Révolution, et, de plus, les phrases de la M. qu’il contient reproduisent cette mélodie non pas telle qu’elle est sortie des mains de Rouget de Lisle, mais telle que divers musiciens l’avaient transformée pour différentes fêtes et cérémonies patriotiques. Il semble donc certain que Grisons n’a fait que s’inspirer de la M. pour une célébration d’une de ces fêtes, entre les années 1792 et 1794.