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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/291

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l’art sacré. Mais de nombreuses cathédrales, même, résistèrent pendant longtemps ; à Notre-Dame de Paris, par exemple, si Veillet (avant 1663), puis Campra (1695 et années suivantes) avaient fait exécuter exceptionnellement des « motets avec symphonie », c’est seulement quelques années avant la Révolution que Lesueur, non sans de violentes oppositions, introduisit dans les offices de grandes compositions avec soli, chœurs et orchestre. En Italie, Burney, à la même époque, constate aussi qu’à part quelques chapelles célèbres, la plus grande quantité des églises, même cathédrales, étaient encore fidèles au répertoire ancien et aux formes traditionnelles. Bien que ses causes fussent lointaines, la décadence de la M. sacrée ne se répandit donc que peu à peu, et c’est seulement la fin du xviiie s. et la première moitié du xixe qui la virent se consommer. Il est superflu de rappeler ici comment le mouvement musical général qui se produisit depuis cette époque amena peu à peu la réforme de la M., consacrée définitivement par Pie x, et rétablissant officiellement dans toutes les églises d’où ils avaient été éloignés, le chant grégorien et la M. a cappella, ainsi que les formes plus modernes « vraiment dignes du temple ». 2. M. protestante. Luther fit connaître en 1523 et années suivantes ses idées et ses intentions pour l’adaptation à son nouveau culte de la liturgie de la messe. Il rédigea la Messe Allemande que retouchèrent ses émules et ses successeurs jusqu’à la transformer totalement. Luther laissait subsister comme parties chantées l’Introït, le Kyrie (celui-ci facultatif, selon l’ordonnance laissée aux « évêques »), le Graduel en le réduisant à deux versets d’antienne et un Alleluia, la Communion (facultative), la Postcommunion, (sous forme d’un choral) et, au lieu de l’ite Missa est, un Benedicamus. Il approuvait les chants pour le Gloria, le Patrem, le Sanctus, l’Agnus Dei, et voulait qu’auprès des restes conservés du chant liturgique romain, un petit nombre de bons chants fussent chantés par le peuple. Ce sont ces chants, qui sous le nom de chorals, et dont une certaine quantité sont d’origine et de tradition catholiques, ont fini par seuls subsister. Luther avait d’ailleurs composé lui-même les mélodies de l’Épître, de l’Évangile et quelques autres intonations de la messe, pour remplacer les chants romains ; mais il suivit pas à pas les modèles de ce chant, les formules de la psalmodie, en se conformant aux règles de la ponctuation musicale et de l’accentuation psalmodique, ainsi qu’à celles des tons de l’église. Il trouva parmi ses amis Senfl, Joh. Walther, George Rhau, et autres, des collaborateurs pour les chorals. Lui-même composa (toujours d’après des modèles romains) la mélodie de Ein’ fest Burg et de Iesaia dem Propheten, vers 1528. Le nombre des morceaux composés par divers musiciens s’augmenta rapidement. Le chœur était formé généralement par les écoliers ; les morceaux de Walther et autres (comme plus tard les psaumes des huguenots français) étaient présentés comme devant remplacer les chansons profanes dans les écoles. L’orgue n’est cité nulle part, comme accompagnant les voix, mais si, plus tard, il fut admis pour les préludes, postludes, etc., on ne trouve pas dans les écrits de Luther un seul passage en sa faveur. Au contraire, la haine de l’orgue et de la musique en général fut une des premières manifestations par où les protestants exprimèrent leur rupture vis-à-vis les cérémonies et les usages catholiques. Zwingli se mit à leur tête : en 1527, l’orgue de la cathédrale de Zurich fut brisé et le chant y cesse complètement. Au xviie s., les églises protestantes imitèrent rapidement les usages des chapelles vénitiennes, et introduisirent l’usage des cantates. Mais, après l’époque glorieuse de la cantate religieuse de Bach et de ses contemporains, une réaction se produisit dans les églises protestantes allemandes, contre le développement musical, et amena une décadence complète au xixe s. L’usage de l’orgue, en particulier, fut à nouveau violemment attaqué ; ardemment défendu, il finit par l’emporter. — * Les calvinistes supprimèrent toute autre M. que le chant populaire des paraphrases des psaumes (voy. ce mot) et des « chansons spirituelles » : mais, à dater au moins de 1565, ils admirent leur harmonisation à plusieurs voix, et, peu à peu, reprirent l’usage de l’orgue. — * Dans l’église anglicane, la M. cultuelle a gardé pour base les usages catholiques, avec addition des chorals luthériens et d’autres chants analogues ; les phases de son développement furent exactement les mêmes que dans l’église catholique romaine. L’anthem = antienne, fut l’une des principales formes particulières à ses compositeurs. De nos jours, le chant grégorien restauré d’après les principes des Bénédictins et les pièces anciennes a cappella ont retrouvé droit de cité et avoi-