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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/297

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des théoriciens modernes, désignés par A dans la nomenclature alphabétique dont il va être parlé. Les professeurs du moyen âge, qui se servaient du monocorde (voy. ce mot) pour l’étude des intervalles et pour l’enseignement du chant, prirent l’habitude de graver sur la boîte de résonance des caractères propres à désigner les sons et ils empruntèrent ces caractères à l’alphabet courant, qui était l’alphabet latin. La N. dite boétienne, ainsi nommée d’après l’emploi qu’en fit Boèce (vie s.) dans son de Institutione musica, sans probablement en être l’inventeur, désignait les sons de deux octaves de la gamme diatonique obtenus sur le monocorde, par les lettres A et P. On en possède plusieurs monuments dans des manuscrits du moyen âge, et notamment dans le célèbre Antiphonaire conservé à Montpellier, où les chants liturgiques sont notés simultanément en lettres et en neumes (xie s.). La N. boétienne permet donc d’embrasser une double octave : ce fut la N. des quinze lettres :


\language "italiano"
\score {
  \relative do {
    \clef bass 
    \set Staff.explicitClefVisibility = #end-of-line-invisible
    \cadenzaOn
    s4 la1^A_\markup { \hspace #-8 { \lower #3 { "I." \italic "Traduction" }}} si^B do^C re^D mi^E fa^F sol^G s2. \bar "" \break
    \clef treble
    s8 la1^H si^I do^K re^L mi^M fa^N sol^O la^P \bar ""
  }
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves \remove Time_signature_engraver }
    indent = 0\cm
    line-width = #120
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
  }
}
\header { tagline = ##f}

La constitution de la N. alphabétique a varié pendant le haut moyen âge. Dès un temps reculé, d’autres auteurs, considérant que la seconde octave double exactement la première, préférèrent se contenter des sept premières lettres, de A à G, qu’ils traçaient en majuscule pour l’octave grave, en minuscule, a à g, pour l’octave aiguë ; après quoi ils vinrent à doubler les minuscules, aa, etc., * pour exprimer les sons contenus dans une 3e octave, à l’aigu :


\language "italiano"
\score {
  \relative do {
    \clef bass 
    \cadenzaOn
    \set Staff.explicitClefVisibility = #end-of-line-invisible
    la1^A_\markup { \hspace #-5 { \lower #3 { "II." \italic "Traduction" }}} si^B do^C re^D mi^E fa^F sol^G \bar "" \break
    \clef treble
    la1^a si^b do^c re^d mi^e fa^f sol^g \bar "" \break
    \override Score.Clef.break-visibility = ##(#f #f #f)
    la^aa si^bb do^cc re^dd mi^ee fa^ff sol^gg
  }
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves \remove Time_signature_engraver }
    indent = 0\cm
    line-width = #120
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
  }
}
\header { tagline = ##f}

La présence dans les plus anciennes pièces de chant d’un son placé un ton au-dessous du premier A, ou une octave au-dessous du premier G, fit introduire l’usage de la lettre grecque majuscule correspondante Γ (gamma), qui donna son nom à la série ascendante diatonique, ou gamme (voy. ce mot). Cette série, donnée par Odon de Cluny († 942) et autres auteurs du moyen âge : ΓABCDEFG, a, etc., se traduit donc de nos jours par sol la si ut, etc.

Cette série se complète par la différenciation du B rond et du B carré (voy. ci-après) et elle permet au moins la N. théorique dans les méthodes, pendant que se développe dans les livres de chant liturgique la N. neumatique. On la trouve appliquée aussi à des chants profanes en langue vulgaire, et même encore à des chants de minnesinger allemands de la fin du xive s.

La distinction du B rond et du B carré résulta au moyen âge de la nécessité de faire accorder la division de l’échelle par octaves avec celle par tétracordes, que l’antiquité avait léguée. En effet, pour pouvoir constituer au milieu de l’échelle de 15 sons une octave dont les intervalles se succèdent dans le même ordre que ceux de l’octave aiguë et de l’octave grave, comptés en descendant, selon l’usage antique, il faut abaisser le si d’un demi-ton ; on le fit en distinguant dans la N. le si abaissé par la forme arrondie du b minuscule, dite b molle et le si naturel par la forme carrée ou b carré, qui furent l’origine du bémol et du bécarre, b quadratum, b quadrum (voy. ces mots).

Après que la N. diastématique (voy. plus bas) eût été adoptée par les musiciens, la N. alphabétique resta employée par les théoriciens, comme ne nécessitant pas de signes spéciaux et n’occupant pas autant de place que la portée.

Mais, à mesure que le progrès des études scientifiques portait à considérer un nombre d’octaves plus étendu que le système des 15 notes autrefois suffisant à la pratique du chant et aux calculs limités des savants, on dut chercher dans le redoublement des lettres et dans l’emploi des indices un moyen d’exprimer la hauteur des sons. D’autre part, l’usage des sept premières lettres de l’alphabet subsiste comme dénominations des sept notes de la gamme, dans les pays de la langue anglaise et allemande ; chez ceux-ci, le B resta attribué au si bémol et l’H fut introduit pour exprimer le si naturel, ou bécarre.