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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/298

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D’autres systèmes alphabétiques furent en usage dans l’antiquité et au moyen âge, par exemple, la N. par voyelles grecques, dans les papyrus gnostiques, la N. nommée dasienne dérivée de certains accents, en usage dans les traités du ixe s., et un autre emploi de la série A-G, appliquée au clavier des orgues. Chez Hucbald, par exemple (ixe-xe s.), les lettres A-G sont employées dans ce cas pour les sons ut-si ; chez Notker Labeo († 1022), on trouve la succession EFGABCD, etc., comme équivalent de la série ΓABCDEF, etc. Cet emploi fixe donc à notre ut l’A du clavier des orgues de ce temps. (Voy. aussi Solmisation.)

À l’époque actuelle, la N. alphabétique subsiste à l’état purement théorique en tant que nomenclature scientifique, chez les nations qui désignent les notes de l’octave par les huit premières lettres de l’alphabet, soit l’Allemagne, l’Angleterre. On s’en sert, dans les traités de physique, par exemple, où elle économise la place dans les pages, et les frais de gravure ; dans les catalogues, où les premières notes d’un thème peuvent être indiquées par les noms des lettres ; dans la facture des pianos, où les noms des notes que rendent les cordes sont marqués par les lettres à côté des chevilles, pour guider le travail de l’accordeur. Mais des divergences se produisent dans chaque branche entre les applications de ce principe. Chez les physiciens, tantôt les octaves successives sont différenciées par l’emploi des majuscules pour l’octave grave, des minuscules pour l’octave moyenne, des minuscules redoublées pour l’octave aiguë ; tantôt par l’emploi de minuscules soulignées de deux traits, d’un trait, puis de minuscules simples, et de minuscules surmontées d’un trait et de deux traits, pour une échelle ascendante de cinq octaves. Dans les ouvrages théoriques, la différenciation des octaves s’obtient, soit par l’emploi d’indices désignant l’octave dans laquelle se place le son voulu, A1, B1, etc., ou A1, B1, etc., soit par la succession des majuscules, minuscules, et minuscules doublées (comme plus haut), pour désigner les trois octaves moyennes dans leur succession ascendante. La langue allemande use, pour exprimer les altérations des notes, par dièses ou bémols, d’un système d’altérations par lettres, l’addition d’une S ou des lettres ES désignant le bémol, celle des lettres IS, les dièses : As = la bémol ; Ais = la dièse.

Quelques compositeurs se sont plu à prendre pour thèmes de tel ou tel ouvrage, les notes correspondant aux lettres ou aux syllabes d’un mot ou d’un nom : B-A-C-H, dans la N. alphabétique allemande, exprimant les notes si , la, ut, si naturel, ces lettres forment un thème musical que Bach lui-même a pris pour troisième sujet de la fugue inachevée qui termine son Art de la Fugue :


\language "italiano"
\score {
  \relative do' {
    \time 2/2
    \clef bass
    \key fa \major
     \partial 2 sib2^\markup { \raise #3 { \italic "B" }} | la^\markup { \raise #3 { \italic "A" }} do^\markup { \raise #3 { \italic "C" }} | si4.^\markup { \raise #3 { \italic "H" }} dod8 re2~ | \stopStaff \hideNotes re4
}
  \layout {
    \context { \Staff 
               \RemoveEmptyStaves 
               \remove Time_signature_engraver
             }
    \context { \Score \override SpacingSpanner.base-shortest-duration = #(ly:make-moment 1/16) }
    indent = 0\cm
    line-width = #120
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
  }
  \midi { }
}
\header { tagline = ##f}

Voir encore les « lettres dansantes » sur le nom de Mme Abbeg (A-B-B-E-G = la, si , si , mi, sol) dans la Fantaisie op. 1 de Schumann, ou son Souvenir sur Gade (G-A-D-E = sol, la, ré, mi) dans son Album pour la jeunesse, etc.

On peut rattacher aux N. alphabétiques l’emploi des voyelles empruntées aux syllabes d’un nom, rapprochées des notes de la gamme. Josquin Després composa, pour l’offrir au duc de Ferrare Hercule Ier, une Messe dont le thème était formé par les voyelles des syllabes composant les mots « Hercules Dux Ferrarie », soit ut ut fa mi . Quelques autres maîtres usèrent de procédés semblables, déjà indiqués au xie s. par Guido d’Arezzo à l’usage des compositeurs manquant d’inspiration.

Enfin, il faut signaler que les lettres C F G de la N. alphabétique sont l’origine des clefs d’ut, fa, sol (voy. Clefs), et que le B, sous ses deux formes, est l’origine du bémol, du bécarre et, disent certains, du dièse (voy. ces mots. Voir aussi iv. Tonic-sol-fa).
|| N. blanche. (Voy. N. proportionnelle.)
|| N. boétienne. (Voy. N. alphabétique.)
|| N. carrée. (Voy. N. grégorienne.)
|| N. chiffrée. — * Dans l’antiquité grecque, les lettres ayant la valeur de chiffres, il est possible que les N. antiques, qui nous paraissent alphabétiques, aient été considérées à certaines époques comme N. chiffrées. De fait, les théoriciens du moyen âge, en dehors de la N. alphabétique, et en sa place, se servaient parfois, au lieu du système des quinze lettres ou des deux octaves répétées, des nombres 1 à 15 ; A (la) correspondait à 1, etc. ; le si de la seconde octave étant la note 9, la distinction du si bémol et du si bécarre se faisait en les nommant nona prima (9e-1e) et nona secunda (9e-2e). Il ne semble toutefois pas que cet usage ait été très répandu, lorsque, à la fin du moyen âge, la N. chiffrée apparaît tout à coup en