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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/505

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le bonheur et la paix ; votre famille. Demain, j’ai quelque espoir que la joie s’y rétablira pour jamais, et que nous serons tous heureux. (Il sort.)

BEVERLEY, après une pause.

Que l’homme est insensé ! Qu’il est petit ! qu’il est absurde ! Qu’est-ce que cet honneur dont il fait tant de bruit, sinon un orgueil impertinent sous un autre nom ; orgueil plus sensible au blâme des autres qu’au reproche de la conscience ? Mais voilà nos préjugés, nos mœurs ; voilà l’hypocrisie et la fausseté de notre âge ; et ces deux vices décorés des titres de la vertu, oui tous les jours leurs martyrs. Je n’aurais jamais imaginé que je fusse d’une nature aussi perverse. (Il continue de rêver.)


Scène VIII.

BEVERLEY, BATES, JARVIS.
JARVIS.

C’est de ce côté que j’ai entendu du bruit. Il m’a semblé reconnaître la voix de mon pauvre maître.

BATES.

Il s’est pris de paroles avec Leuson. Ils se sont querellés, j’en suis sur ; mais je ne sais pourquoi.

JARVIS.

11 est vrai qu’ils se sont querellés, le désespoir poursuit celui-ci.

BATES.

Que n’allez-vous à lui ? que ne le ramenez-vous dans sa maison ?… Mais il s’avance de ce côté ; je ne veux pas qu’il me voie. (Bates sort.)

BEVERLEY, surpris.

Qui est cet homme ? à qui en veut-il ? (Apercevant jarvis.) L’ami, es-tu un assassin ? Viens ; marche le premier. J’ai une main aussi fatale que la tienne ; un cœur aussi féroce… Jarvis, c’est toi ?… Bonhomme, que fais-tu ici ? Retire-toi ; va te coucher. Le serein suflit pour t’ôter la vie.