Aller au contenu

Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/517

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

JARVIS.

Ô que je suis dur !… je me réjouis ; et comment puis-je me réjouir de la fin d’un homme, d’un vieillard ?… Madame, d’hier, votre oncle n’est plus.

MADAME BEVERLEY.

Mon oncle ! ô ciel !

CHARLOTTE.

Comment l’avez-vous appris ?

JARVIS.

Son intendant est venu… il arrivait exprès… je l’ai rencontré… il s’informait dans le voisinage où vous logiez… Cette nouvelle aurait dû m’allliger… Mais votre oncle était vieux, mon maître dans une prison… J’ai pensé qu’il en sortirait, qu’il serait encore heureux… S’il fût resté un jour de plus où il est, j’en serais mort de peine.

CHARLOTTE.

Et cet intendant, où l’avez-vous laissé ?

JARVIS.

Je n’ai pas voulu qu’il mit les pieds ici, et qu’il vît votre détresse ; et puis je ne voulais pas qu’un autre que moi vous apportât une heureuse nouvelle : c’est un bonheur que je voulais avoir encore avant que de mourir. Enfin, mon maître sera encore de ce monde.

MADAME BEVERLEY.

Vite, vite, allons à lui ; ne différons pas notre joie et la sienne.

JARVIS.

Je ne vous ai point amené de voiture, je n’y ai pas pensé : mais Lucy vient d’en envoyer chercher une.

MADAME BEVERLEY.

Il ne m’en faut point : je me sens des ailes.

CHARLOTTE.

Je ne sais ce qui me serre le cœur ; apparemment que je ne puis recevoir de la joie que mon frère ne soit à portée de la partager. Jarvis, comment a-t-il passé la nuit ?

JARVIS.

Que vous dirai-je ? Dans un long rêve où il ne voyait qu’horreur et que sang, entre le désespoir et la mort… Quand on l’eut