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Plusieurs ont cru que l’hommage lige n’avoit commencé d’être pratiqué que dans le xij. siecle ; nous avions même incliné pour cette opinion en parlant ci-devant des fiefs liges ; mais depuis l’impression de cet article, M. Gouliart de la Feuillie, conseiller-clerc au parlement de Douay, dont j’ai déja parlé sur le mot hommage en général, m’a fait observer que les fiefs liges étoient connus en France long-tems avant le xij. siecle, qu’en 1095 se tint le concile de Clermont en Auvergne, auquel assisterent Urbain II. & un grand nombre d’évêques, & entre autres Lambert, évêque d’Arras, qui en 1097 tint un synode connu sous le nom de code lambertin, dans lequel il rappelle une partie des canons du concile, quos canones è claro montano concilio attulerat ; & que l’article 17. de ce code est conçu en ces termes, nec episcopus vel sacerdos regi vel alicui laïco in manibus ligiam fidelitatem faciat ; d’où il est aisé de s’appercevoir que l’on abusoit dès-lors des fiefs liges, ce qui donne lieu de conclure qu’ils étoient connus depuis quelque tems dans toute la France & l’Italie, non seulement quant à l’hommage, mais même par rapport au nom de liges. S. Antonin & le Jésuite Maurus paroissent avoir été instruits de cette décision, lorsqu’ils ont expliqué le mot liga par obsequium, & par les mots legitimam ei facientes fidelitatem. Tous les deux ont voulu faire entendre par ces expressions, que l’Abbé de S. Jean d’Angely n’a point fait d’hommage lige à Louis VIII. mais qu’il avoit uniquement promis la fidélité.

M. de la Feuillie observe aussi, que lorsque le concile a défendu aux évêques & aux prêtres de rendre aucun hommage lige, soit au roi, soit aux laïcs, il n’a pas prétendu approuver qu’un pareil hommage pût se rendre d’ecclésiastique à ecclésiastique ; ce qui ne se pourroit faire sans abus, puisque le roi est le seigneur dominant de tous les vassaux de son royaume, & qu’il n’est point possible d’imaginer un devoir de vassalité qui ne puisse & ne doive être rendu au roi au moins dans le cas d’ouverture du fief.

Néanmoins les évêques exigeoient aussi l’hommage lige des ecclésiastiques qui étoient leurs inférieurs & leurs vassaux. On en voit des preuves dans la nouvelle diplomatique, pag. 276.

Enfin M. de la Feuillie a encore observé que le mot ligium étoit rendu en Italie dans les xj. & xij. siecles par le mot hominium, comme on le voit d’un ancien concordat entre le pape Adrien & Fréderic I. episcopi Italiæ solum sacramentum fidelitatis sine hominio facere debent domino imperatori. De-là vient qu’en France les évêques ne font point hommage au roi ; mais prêtent seulement le serment de fidélité : & l’auteur des nouvelles notes sur la derniere édition de Ferret, s’est trompé en avançant que l’on trouvoit le mot hommage dans quelqu’une des formules du serment de fidélité rapportées dans le livre des libertés de l’Eglise Gallicanne.

On peut ajoûter à cette remarque de M. de la Feuillie, que le roi Louis le Gros & Louis VII. son fils, alors duc d’Aquitaine & comte de Poitou, par des lettres de l’an 1137, ordonnerent que les élections, soit à l’archevêché de Bordeaux, aux évêchés suffragans & aux abbayes de cette province, seroient faites librement suivant les canons, & que ceux qui seroient élus ne feroient point hommage pour leurs bénéfices, ni n’en demanderoient pas l’investiture.

Pour ce qui est du tems où l’hommage lige commença à être en usage, les remarques de M. de la Feuillie nous ayant engagé à faire de notre côté de nouvelles recherches, nous avons trouvé que l’hommage lige étoit déja usité en France dès le ix. siecle. On voit en effet, dans un diplome de Charles le Chauve de l’an 845, rapporté par dom Bouquet dans son hist. de Languedoc, tom. VIII. p. 470, que le

comte Vandrille y est qualifié homme lige, homo ligius ; il possédoit des bénéfices civils & des aleux ; on ne fait pas mention de fiefs, l’usage n’en étoit pas encore établi ; ainsi l’hommage lige a commencé long-tems avant les inféodations, & étoit dû pour les bénéfices civils qui avoient été concédés à cette condition, ou pour les aleux qui étoient convertis en bénéfices par le moyen des recommandations usitées sous les deux premieres races, & dont l’effet étoit que le possesseur d’un aleu se mettoit sous la protection de quelque seigneur puissant, & se rendoit son homme.

On voit dans un ancien hommage rendu à un seigneur de Beaujeu, qu’en signe de fief lige, le vassal toucha de sa main dans celle du procureur général du seigneur.

Les femmes faisoient aussi l’hommage lige. On voit, par exemple, dans un terrier de 1351, qu’à Chalamont & Dombes, une femme se reconnut femme lige, quoique son mari fût homme de noble homme Philippe le Mesle.

Depuis l’abolition des guerres privées, l’hommage lige n’est proprement dû qu’au roi ; quand il est rendu au roi & autres grands seigneurs, il faut excepter le roi.

L’hommage lige doit être rendu en personne, de quelque condition que soit le vassal. (A)

Hommage de foi & de service est lorsque le vassal s’oblige de rendre quelque service de son propre corps à son seigneur, comme autrefois lorsqu’il s’obligeoit de lui servir de champion, ou de combattre pour lui en cas de gage de bataille. Voyez l’ancienne coûtume de Normandie latine & françoise, ch. xxix. Bouteillier dans sa somme rurale, pag. 479. (A)

Hommage de paix, suivant l’ancienne coûtume de Normandie, ch. xxix. c’est quand quelqu’un poursuit un autre pour un crime, & que la paix est rétablie entre eux de maniere que celui qui étoit poursuivi fait hommage à l’autre de lui garder la paix. Voyez Bouteillier dans sa somme, p. 419, & la glose sur le ch. xxix. de l’ancienne coûtume de Normandie. (A)

Hommage plane ou plein est la même chose qu’hommage lige, comme on le voit dans les coûtumes de la Rochelle, art. 4. Ponthieu, 77. Amiens, art. 7. 25. 186. & 189. Voyez Brusselle, usage des fiefs. Voyez Hommage lige. (A)

Hommage simple est celui où il n’y a pas de prestation de foi, mais seulement l’hommage qui se rend au seigneur nue tête, les mains jointes avec le baiser. On l’appelle simple par opposition à la foi & à l’hommage que le vassal doit faire les mains jointes sur les évangiles avec les sermens requis. Voyez Hommage lige. (A)

HOMMAGER, s. m. (Jurisprud.) est celui qui doit hommage au seigneur ; ce terme est usité dans quelques coûtumes & provinces de droit écrit, pour signifier un vassal. Voyez Cambolas, liv. IV. chap. xliv. Dolive, liv. I. ch. xxix. (A)

* HOMME, s. m. c’est un être sentant, réfléchissant, pensant, qui se promene librement sur la surface de la terre, qui paroît être à la tête de tous les autres animaux sur lesquels il domine, qui vit en société, qui a inventé des sciences & des arts, qui a une bonté & une méchanceté qui lui est propre, qui s’est donné des maîtres, qui s’est fait des lois, &c.

On peut le considérer sous différens aspects, dont les principaux formeront les articles suivans.

Il est composé de deux substances, l’une qu’on appelle ame (Voyez l’article Ame), l’autre connue sous le nom de corps.

Le corps ou la partie matérielle de l’homme a été beaucoup étudiée. On a donné le nom d’Anatomistes