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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/148

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par des centaines d’yeux, ensuite ce serait la fin pour toi et tes compagnons de captivité.

D’ailleurs, j’ai ta parole et pour te prouver quelle est ma confiance en elle, je vais t’indiquer l’emplacement de ces deux bâtiments ; ils occupent les numéros 5 et 6 de la première ligne en commençant par le Nord. Si je te donne ce renseignement, c’est que je pense que ton cœur battra en les regardant pendant qu’il en est encore temps.

De Melval n’avait rien trouvé à répondre, le jeune prince avait lu en lui comme dans un livre ouvert.

Mais, maintenant, il se demandait s’il n’avait pas eu tort de s’opposer à l’entreprise de Zahner le jour de la visite à l’usine, entreprise que l’héroïque garçon eût peut-être menée à bien, malgré les difficultés du moment, s’il n’en avait été dissuadé.

Évidemment, c’était la parole violée, cela ne faisait aucun doute.

Mais quel résultat ! Le chef de l’Invasion noire et son état-major, Zérouk et son secret, tout cela partant en fumée !

C’était l’anéantissement de ces projets qui lui apparaissaient chaque jour plus formidables.

Car où se fût-il rencontré, l’homme de génie capable de reprendre et de continuer cette œuvre gigantesque ?

De Melval ne s’était-il pas trompé en mettant l’honneur là où il n’était pas, et n’était-ce pas lui qui avait eu raison, ce brave Zahner, avec son jugement simple et sa nette vision du résultat ?

En somme, c’était tout bonnement héroïque, ce qu’il avait proposé là.

C’était l’histoire de Bisson se faisant sauter avec son bâtiment, du garde Henriot mettant le feu, en 1870, à la poudrière de la citadelle de Laon et de tant d’autres dont l’histoire a conservé les noms.

Il y avait même entre eux et lui cette différence que Zahner n’avait nullement songé à immortaliser le sien, puisque jamais l’écho de ce sacrifice n’eût dépassé les rivages de la mer Rouge.

Oui, là peut-être était le devoir…

Mais il était trop tard maintenant pour le regretter.