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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/162

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cet étroit espace se prolongeait encore quelques semaines.

Là, comme dans les armées d’Europe, le succès pouvait dépendre des « services administratifs ».

Or les services administratifs existaient dans l’armée noir : à l’état rudimentaire il est vrai, mais ils existaient et bien mieux fonctionnaient.

Toujours à l’imitation de ce qu’avait fait Abd-el-Kader, le Sultan avait auprès de lui de hauts fonctionnaires qui étaient :

Le « Khaznadar-el-Kébir », premier intendant chargé du service des fonds.

Le « Khaznadar-es-Sghaïr », chargé de la comptabilité des subsistances et des munitions.

Au-dessous d’eux « le Bach-Kummendji » ou chef du magasin des vivres, répartissant les approvisionnements accumulés en des points déterminés.

Ces trois administrateurs étaient eux-mêmes surveillés par l’« Oukil-el-Khalifa », homme de confiance du Sultan, remplissant les fonctions attribuées en France aux « contrôleurs de l’armée ». C’était un vieux marabout d’une intelligence remarquable et dont l’incorruptibilité était proverbiale.

Par ordre d’Abd-ul-M’hamed, chaque armée avait dû être pourvue par ses chefs de fonctionnaires analogues chargés d’assurer l’équitable distribution des denrées.

Mais à l’inverse de ce qui se passe dans les armées européennes, cette immense manipulation n’exigeait aucune comptabilité ; seuls les chefs de service prenaient note approximative des quantités distribuées, pour se rendre compte par expérience de ce qui était journellement nécessaire à de pareilles quantités d’hommes, et être en mesure d’assurer la constitution d’approvisionnements ultérieurs.

Et on eût bien fait rire le prince Omar, qui ne perdait pas de vue cette partie de ses fonctions de chef d’état-major, si on lui eût reparlé des minuties en honneur dans l’armée française, et rappelé à ce sujet son cours d’administration de Saint-Cyr. Les bons, états, carnets à souche et enregistrements de toutes sortes n’existaient plus dans sa mémoire qu’à l’état de souvenir démodé.

Et pourtant, entassés dans ce coin d’Afrique, des centaines