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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/224

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Il avait ôté sa chéchia, rabattu sur ses yeux le capuchon de son manteau d’occasion, et, dans cette tenue, il eût pu passer à deux pas de Zérouk sans être reconnu de lui.

Car, à lui aussi, le colonel avait recommandé de dissimuler sa présence, tenant aux effets de confrontation que ménage si habilement, en toute occasion, la justice anglaise.

Dans un des réduits du fort intérieur, le capitaine retrouva enfin celui qu’il cherchait, non sans avoir dû plus d’une fois s’abriter en traversant la cour pour éviter les éclats d’obus.

C’était un lieutenant de vaisseau d’une trentaine d’années, au type méridional très accusé ; il examinait attentivement la manœuvre d’une pièce sous casemate par des canonniers anglais.

C’étaient deux canons de l’ancien système Wolwich, de cent onze tonnes, fabriqués jadis par l’usine Armstrong, pour armer les cuirassés de la classe Admiral ; en 1898, l’Angleterre les avait relégués dans ses batteries de côte pour adopter les nouveaux engins qui, d’après les idées nouvelles, devaient constituer l’artillerie des bâtiments dotés d’une vitesse supérieure.

Depuis quinze ans, en effet, on s’était aperçu que la qualité première des bâtiments était la vitesse. La guerre du Japon contre la Chine avait été à ce sujet une véritable révélation ; les cuirassés chinois, fabriqués cependant dans l’usine anglaise de la Clyde et que leur défaut de mobilité transformait en citadelles flottantes incapables de manœuvrer, n’avaient pu tenir devant les bâtiments rapides et manœuvriers des Japonais.

D’ailleurs, les vaisseaux évoluant lentement offraient un but trop facile à atteindre, non seulement aux torpilles automobiles, mais surtout aux bâtiments sous-marins qui venaient d’être introduits définitivement dans toutes les marines de guerre.

Dès lors l’Amirauté anglaise, dont la devise est de toujours devancer dans la voie du progrès les autres puissances navales, avait cessé la construction des cuirassés d’escadre à tourelles barbettes du type Royal Sovereing, dont la vitesse ne dépassait pas 17 nœuds 1/2, pour lancer