venus raseraient la côte arabique et aborderaient par le front oriental.
Le restant du jour avait été employé à noyer les poudres, à jeter à la mer les culasses des pièces, à détruire enfin tout ce qu’on ne pouvait emporter.
Le colonel avait fait cadeau à de Melval d’un magnifique revolver et de deux cents cartouches.
— C’est le plus beau cadeau que vous puissiez me faire, dit l’officier, car ma provision de cartouches tirait à sa fin, et il m’était bien impossible de m’en procurer d’autres ; dans fort peu de temps donc mon pauvre revolver, un prix de tir du camp de Châlons, fût devenu inutile.
— Et c’eût été dommage, reprit le colonel, car c’est une rude arme dans votre main.
Tous les feux avaient été éteints, et sur les débris du parapet les vigies veillaient, prêtes à signaler les bâtiments.
Dans l’ombre d’un bastion, trois ombres causaient à voix basse.
— Ma Nedjma, je t’en prie, disait de Melval, obéis-moi, écoute-moi, profite de cette occasion unique puisque tu seras accompagnée et protégée ; mon ami, un Français comme moi, un officier comme moi, te conduira chez les miens où tu m’attendras.
– Non, non, mille fois non, répéta Nedjma ; où tu iras, j’irai, où tu restes, je reste ; pourquoi ne viens-tu pas, toi ?
— Ma parole ! Nedjma, tu le sais bien.
— Ta parole ! toujours !
— Oui, à la pensée qu’en ce moment, Omar ne me voyant pas, se figure que je l’ai violée, que j’ai profité de cette traversée pour me dérober, à cette pensée qui me pèse lourdement, j’éprouve un malaise indéfinissable : je voudrais être déjà de retour à son camp et lui dire : me voilà.
— Eh bien ! tu lui diras nous voilà, car je ne te quitterai point.
Et tendrement elle entoura son cou de ses deux bras nus.