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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/266

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ignores-tu donc ce qu’était autrefois le pèlerinage de La Mecque ? C’était le rendez-vous annuel de deux et trois cent mille croyants ; six caravanes y arrivaient régulièrement chaque année de tous les points cardinaux ; nos ancêtres ont vu des princes souverains s’y rendre suivis de populations entières, et le dernier des Abasides, Mostassem-Billah, y campa avec cent trente mille chameaux. Le pèlerinage était autrefois considéré comme un acte commandé par Dieu lui-même.

Aujourd’hui cinquante mille pèlerins à peine visitent chaque année Bit-Allah (la maison de Dieu) ; il n’arrive plus que trois caravanes, de Syrie, d’Egypte et de l’Yémen ; la plupart des pèlerins prennent la voie de mer et débarquent à Djedda. Encore ont-ils à subir dans ce port le contrôle de l’Europe.

— Tu ne peux cependant nier le salutaire effet de ce contrôle. Si la commission sanitaire internationale n’était pas là pour imposer des quarantaines aux caravanes empoisonnées par le choléra, l’Europe serait infestée chaque année.

— Le beau malheur ! fit Omar, que décidément l’approche de La Mecque exaltait lui aussi.

— Tu tournes au barbare, mon cher camarade, reprit de Melval ; tu t’assois déjà fort convenablement sur les lois de la guerre. Tu admets le carnage sans prisonniers et sans merci, et tu ne serais pas éloigné, je vois cela, de désirer l’empoisonnement par le typhus, le choléra et la peste, de tous les peuples d’Europe. Ta besogne de conducteur d’invasion en serait singulièrement facilitée.

Et je me répète pour la centième fois : qui m’eût dit cela autrefois à Saint-Cyr, quand tu ne pensais qu’au « cornard » du gérant, aux « galettes » du dimanche et…

Il allait ajouter et à la jolie Suzanne : il se retint ; mais il sentit le regard d’Omar sur les siens. Il avait été deviné, et il en fut tout à fait certain, lorsque Omar, rompant cette conversation qu’il évitait à tout prix, prétexta qu’il avait à recevoir un lot de chevaux du Nefoud, envoyés au Sultan par l’émir du Chammar.

— Des chevaux du Nefoud, s’écria de Melval, la plus belle race du monde ! je vais voir ça aussi.