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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/269

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« choix » n’était pas fait pour moi ; on ne m’en avait pas trouvé digne et je comprends ça, car je n’ai jamais pu mordre à l’administration ; figurez-vous qu’à l’examen écrit, j’ai piqué un « mini » sur la loi des réquisitions, parce que j’ignorais que l’article 194 du Code militaire a prévu cinq ans de prison pour les charretiers qui abandonnent leurs attelages réquisitionnés par l’autorité militaire.

— Pauvre Zahner ! fit de Melval en riant, moi aussi je l’ignore l’article 194, et pourtant je suis passé au choix.

— Attendez, fit le lieutenant qui semblait prendre un plaisir particulier à se plonger dans tous ces souvenirs ; j’ai encore été nul sur une autre question administrative : toujours dans cette loi des réquisitions, j’ai omis de spécifier que les veuves et les filles vivant seules étaient dispensées de fournir le logement chez elles… Et pourtant, un jour en manœuvres, j’ai logé chez une jeune veuve qui…

Il allait entamer une de ces histoires avec lesquelles il excitait l’hilarité générale à la pension.

— Je crois que vous me rasez, fit de Melval en riant, et je reviens à votre ancienneté, car il me vient à votre sujet une idée qui ne manque pas de piquant. Suivez mon raisonnement : Si le ministre ne vous avait pas rayé du nombre des vivants, il eût été obligé de vous nommer capitaine.

— Parfaitement, je serais passé il y a un mois.

— Or, c’est indûment qu’il vous a rayé, puisque vous n’êtes pas mort.

— Rien de plus juste.

— Et s’il était là, il vous nommerait tout de suite.

— J’en suis certain.

— Mais qui peut représenter le ministre dans notre détachement ? car nous formons un vrai détachement en subsistance dans l’armée du Sultan.

— Vous, évidemment, mon capitaine.

— Alors la conclusion s’impose et, après tous ces considérants, je vous nomme capitaine à la date du premier Ramadan qui commence demain : à dater de ce jour, vous aurez droit…