Aller au contenu

Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— À un poisson séché de plus par jour, interrompit Zahner en riant ; mais ne nous plaignons pas, on n’est pas trop mal nourri ici : quant à la solde, nous allons avoir droit à un rude arriéré quand nous rentrerons au corps ; je ne veux pas penser dès maintenant à toutes les bonnes choses que je m’offrirai quand j’aurai touché la forte somme ; mais il y a beaucoup de chances pour que je ne la consacre pas à l’achat d’un éclimètre.

— Mais, mon brave Zahner, rien ne vous empêche d’y penser dès maintenant ; vous n’avez pas l’air de vous douter que dans six mois nous serons à Paris.

— À moins que quelque chose ne craque d’ici Constantinople.

— Allons donc ! l’Arabie, la Syrie, l’Asie Mineure, tout cela est turc, et d’après ce que nous voyons ici du lâchage de la Sublime Porte par ses infidèles sujets, nous pouvons bien nous attendre au même spectacle tout le long du chemin jusqu’à la mer de Marmara.

— Et même au delà, vers la Turquie d’Europe, car les Turcs d’Europe doivent être dans les mêmes dispositions que ceux d’ici.

— Oui, mais là-bas, nous rencontrerons l’Angleterre, la Russie, et peut-être d’autres ; toutes les puissances intéressées à la conservation de Constantinople auront mis la main dessus et ce sera dur de la leur reprendre.

— D’autant plus que les flottes européennes seront payées pour se méfier et que le Sultan n’aura plus les mêmes moyens d’action contre elles, puisque vous avez supprimé clandestinement le chef de la fabrication des poudres.

— C’est vrai, mais le Bosphore n’a pas la largeur du détroit de Bab-el-Mandeb, et, si la population de Constantinople en tient pour notre Sultan, je ne vois pas que les navires anglais ou russes puissent nous empêcher d’y arriver.

— Ma foi, comme notre liberté en dépend, j’avoue à ma honte que je fais des vœux pour tous ces moricauds, reprit Zahner ; qu’ils entrent donc à Constantinople, et sans trop tarder ; après quoi, s’ils avaient le mauvais goût de pousser jusqu’aux frontières de France, nous pourrions nous rattra-