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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/99

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française aux portes du Sahara lui avait même causé une secrète joie en lui donnant l’espoir de pêcher en eau trouble au Maroc, lorsque l’ère des soulèvements serait close.

Mais elle avait pris peur en voyant des agglomérations énormes affluer jusqu’au Nil.

La destruction de Dongola et de Wadi-Halfa par les mahdistes, la reprise de Kassala sur les Italiens, par ces derviches dont on affectait à Rome de faire si peu de cas, avaient été pour elle un véritable coup de foudre. Sa quiétude, que n’avaient pas troublée les désastres algériens, s’était évanouie en constatant que le bassin du Nil était inondé de combattants, de Berber aux Grands Lacs.

Et elle dut reconnaître que la politique d’égoïsme, dans laquelle elle se cantonnait depuis des siècles, n’était plus de mise en ces graves circonstances.

L’idée maîtresse de l’Angleterre, celle qui avait dirigé toute sa politique africaine depuis cinquante ans, consistait à réunir d’une façon ininterrompue le bassin du Nil à ses territoires du Zambèze, c’est-à-dire l’Égypte, qu’elle avait toujours refusé d’évacuer, à sa riche colonie du Cap.

Cette idée, elle l’avait poursuivie avec une ténacité extraordinaire, englobant dans sa zone d’influence le cours du Nil tout entier, bien que le Mahdi lui en interdit l’accès.

Elle dominait ainsi sans interruption, réellement ou nominalement d’Alexandrie jusqu’à l’Ouganda, d’où elle avait chassé les missionnaires français.

Pendant ce temps, au Sud, le puissant gouverneur du Cap, Sir Cecil Rhodes, « le Roi du Diamant » et ses successeurs, atteignaient le Nyassa, le Bangouélo et le Tanganyika, au mépris des droits du Portugal, qui voyait, par la raison du plus fort, ses possessions de Benguela coupées de celles du Mozambique.

Seule, l’Allemagne avait arrêté la réalisation totale du projet, et empêché les deux énormes tronçons anglais de se rejoindre en poussant sa colonie de l’Afrique orientale jusqu’au bord du Tanganyika.

Mais l’Angleterre n’avait pas été embarrassée pour si peu.

Ce qu’elle n’avait pu gagner sur la rive orientale de ce lac, elle l’obtint sur la rive opposée, et par une entente avec les Belges, elle se fit céder une bande de terrain sur